Jeudi avait lieu un événement à ne pas manquer : la soirée Economic Expectations 2024 organisée par Gondola, soit l'opportunité de jeter un regard anticipatif sur ce que réserve cette année à notre paysage économique. Le point sur les perspectives évoquées par les quatre experts invités à s’exprimer.

Après plusieurs années particulièrement mouvementées (covid, inflation, guerre en Ukraine…), que nous réserve 2024 ? C’est à cette question que les quatre experts invités par Gondola pour son événement ‘Economic Expectations’ ont tenté d’apporter des éléments de réponse. « L'économie belge s’est montrée très résistante jusqu'à présent, plus que celle de la zone euro », a notamment expliqué Raïsa Basselier, économiste à la Banque nationale (BNB). « Au cours des années à venir, la croissance du PIB devrait rester relativement stable, autour de 1,3%, tandis que la demande intérieure devrait se modérer et les exportations nettes devenir un peu moins négatives. En outre, cette croissance stable du PIB devrait s'accompagner d'une création régulière d'emplois sur la période 2024-2026 et d’un taux de chômage qui devrait se maintenir à un niveau historiquement bas. » Enfin, l’experte de la BNB a également constaté qu’en ce qui concerne le retail plus spécifiquement, les habitudes d'achat d'avant la pandémie étaient « presque » revenues.

« La pression sur les volumes se maintiendra en 2024 »

De son côté, Tom Penninckx, client business partner chez NielsenIQ, a rappelé que l'augmentation des prix dans la catégorie des produits FMCG en Belgique a été aussi forte au cours des deux dernières années que sur l'ensemble des neuf années précédentes. La hausse de prix a également été très forte pour de nombreux produits de base comme le fromage, le lait, les produits de boulangerie, etc. mais avec, dans ces cas-là, un impact limité en termes de volume, a-t-il ajouté. « La priorité absolue est donc de comprendre le changement de comportement des consommateurs. Dans un tel contexte, les consommateurs réduiront les catégories dont ils n'ont pas besoin, mais ils continueront à acheter des produits de base. » En 2023, les private labels ont par ailleurs connu une année record, a encore souligné Tom Penninckx. « Après la perte de parts de marché la plus importante à cause du covid, le gain des PL au cours des deux dernières années a été le plus élevé des deux dernières décennies. Cependant, l’augmentation des parts de marché des PL et celle des prix ont ralenti au cours du dernier trimestre. Dans la mesure où l’on s’attend à une hausse des prix plus limitée à l’avenir, on peut également tabler sur une stagnation des private labels. Un fort déclin est toutefois peu probable sans un nouvel élan de l'économie domestique dans la mesure où de nouvelles habitudes ont été créées en faveur des PL. » Enfin, l’expert de chez NielsenIQ a également pointé que la progression des produits FMCG en ligne était amenée à se poursuivre, le nombre de nouveaux consommateurs sur ce canal ayant notamment connu une hausse de 30% dans les 5 grands pays de l'UE en 2023. Et Tom Penninckx de conclure : « La pression sur les volumes se maintiendra en 2024 à cause d'une focalisation sur les prix qui conduit à n'acheter que l'essentiel, à éviter le gaspillage, etc. Par contre, les conditions météorologiques et les événements sportifs entraîneront un effet légèrement inverse. »

Gagnants, perdants

Si Tom Simonts, senior financial economist chez KBC, s’est logiquement surtout concentré sur les thèmes financiers dans son intervention, abordant tour à tour les politiques des banques nationales en matière de taux d’intérêt, la question des dettes publiques ou encore les risques qui pèsent sur le commerce mondial (tensions en Mer Rouge, assèchement du lac Gatún au Panama…), Davy Van Raemdonck, director Consumer Panel Services Belgium & The Netherlands chez CPS GfK, est pour sa part revenu à des sujets davantage axés sur la consommation. Après avoir brièvement abordé la récente acquisition de CPS GfK par le spécialiste britannique des sondages YouGov, le dirigeant a enchainé en soulignant que les préoccupations d’ordre économique et budgétaire demeuraient au premier rang en Belgique. « Si les augmentations de prix se poursuivent, les principales stratégies d'adaptation des Belges consisteront à acheter moins, à acheter en promotion et à passer à des produits moins chers », a-t-il rappelé. De là découle un autre point intéressant soulevé par Davy Van Raemdonck jeudi soir : « Les leaders du marché perdent du terrain non seulement par rapport au PL mais aussi par rapport à d'autres marques, tandis que les challengers du marché en profitent aux dépens d'autres marques. » Avec quel impact sur les canaux de vente des produits FMCG ? « Les discounters, les commerces de proximité, le low end retail et l'étranger enregistrent une croissance. » Et quid de la concurrence au niveau des circuits de distribution ? « Le shopping à l'étranger et le hard discount sont les principaux gagnants au détriment des hypermarchés et des supermarchés. » Reste la question qui brûle toutes les lèvres en ce début d’année : 2024 sera-t-elle dans la même veine que 2023 ou pas ? « Si les prix continuent d'augmenter, il est probable que les gens continueront d'acheter moins et/ou de se tourner vers des alternatives moins chères », a prévenu Davy Van Raemdonck. « Les marques A vont continuer à souffrir à l'avantage des marques de distributeurs. Mais actuellement, ce sont les PL du hard discount qu’il faut le plus tenir à l’œil. Les retailers à bas prix devraient continuer à profiter de la situation, de même que les achats transfrontaliers... » À moins bien sûr que « quelque chose » ne se produise et vienne rendre toutes ces prévisions obsolètes, conclut le patron de Consumer Panel Services pour la Belgique et les Pays-Bas.