L'inflation a très légèrement augmenté en mars pour atteindre 6,67%, ressort-il des chiffres publiés jeudi par Statbel. L’inflation des produits alimentaires a par contre poursuivi sa  forte hausse : 17,02% contre 16,12% en février. La faute aux marges bénéficiaires des entreprises ?

En mars, l’inflation s’est élevée à 6,67% contre 6,62% en février et 8,05% en janvier, marquant ainsi une stagnation dans la décrue observée depuis l’automne dernier. Sur la base de l’indice santé, l’inflation a par contre augmenté à 7,35% contre 6,84% en février et 8,28% en janvier, précise Statbel. Le taux d’inflation hors produits énergétiques grimpe toujours (9,25% en mars, 8,87% en février et 8,61% en janvier), tout comme l'inflation sous-jacente, qui ne tient pas compte de l'évolution des prix des produits énergétiques et des produits alimentaires non transformés (8,57% en mars, 8,28% en février et 8,05% en janvier). Enfin, l’indice des prix à la consommation a augmenté de 0,72 points (+ 0,57%) pour atteindre 127,67 points contre 126,95 points en février 2023 et 128 points en janvier.

Les produits alimentaires, dont l’inflation s’est établie 17,02% en mars, a contribué à hauteur de 3,12 points de pourcentage à l’inflation générale. Les principales hausses de prix enregistrées par Statbel concernent les fruits, l’électricité, les soins corporels, les légumes, les confiseries, les voyages à l’étranger, le pain et les céréales, les restaurants et cafés ainsi que les boissons non alcoolisées. Gaz naturel et boissons alcoolisées ont par contre exercé un effet baissier, note l’office belge de statistique.

Les marges bénéficiaires moteur de l’inflation ?

Alors que la flambée des prix de l’énergie et des matières premières, avec la hausse des salaires en corolaire, a longtemps été pointée comme la principale explication de la forte inflation de 2022, mais une autre image est en train de se former ces dernières semaines. Une image guère à l’avantage des entreprises et qui a encore été renforcée par un article publié jeudi sur le blog de la BCE par trois économistes de l’institution. Ces derniers écrivent en effet que l'une des principales causes de l'inflation élevée, outre les facteurs externes (prix de l'énergie, perturbations de la chaîne d'approvisionnement…), semble être l'augmentation des marges bénéficiaires des entreprises, bien avant l’augmentation des salaires.

« De nombreuses entreprises sont apparemment en mesure d'accroître leurs marges bénéficiaires sans subir de pertes significatives de parts de marché », indiquent les auteurs. « Comment cela se fait-il ? Tout d'abord, la demande dépasse l'offre dans de nombreux secteurs (…) Les prix élevés des intrants (par exemple pour l'énergie) ont également permis aux entreprises d'augmenter plus facilement leurs marges bénéficiaires, parce qu'il est plus difficile de déterminer si des prix plus élevés sont dus à des coûts plus élevés ou à des marges plus élevées. Et puisque (…) les entreprises cherchent à récupérer leurs pertes de revenus réels chaque fois que cela est possible, l'environnement d'inflation élevée peut fournir une occasion supplémentaire de le faire. » Et les économistes d’ajouter : « Entre 1999 et 2022, les profits ont représenté en moyenne un tiers du déflateur du PIB (un indicateur économique permettant de mesurer l'inflation, ndlr). En 2022, ils ont contribué à hauteur de deux tiers. »

« La plupart des entreprises ont vu leurs marges diminuer en 2022 »

Pour Raïsa Basselier, économiste à la BNB, ces constatations ne semblent toutefois pas illogiques au vu du contexte. « À court terme, les entreprises peuvent adapter leurs prix plus rapidement que ne le font les négociations salariales », explique-t-elle. « Il n'est pas exclu que les entreprises prennent une certaine ‘avance’, mais ce phénomène sera contrebalancé plus tard, lorsque les négociations salariales se traduiront par des coûts salariaux plus élevés. » À cet égard, l’experte de la Banque nationale rappelle que les salaires sont adaptés plus rapidement en Belgique que dans les autres pays de la zone euro via l'indexation automatique des salaires. « Par conséquent, les pressions sur les prix domestiques en Belgique sont probablement alimentées par l'évolution des salaires plus fortement que dans la zone euro, et donc moins par l'évolution des marges bénéficiaires. » Et Raïsa Basselier de se référer à une récente étude sur les marges bénéficiaires réalisée par deux collègues de la BNB. « Ils ont constaté que seul un petit groupe de très grandes entreprises détermine le niveau macroéconomique des marges bénéficiaires, lesquelles semblaient augmenter davantage au début de 2022. Toutefois, la plupart des entreprises ont en fait vu leurs marges diminuer en 2022 par rapport à 2021. Et c'est également le cas pour les supermarchés, les magasins d'alimentation spécialisés et les autres commerces de détail », conclut l’économiste.

Etude de la BNB janvier 2023 téléchargé le 03/04/2023

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