Tony's Chocolonely a été retiré de la liste des produits qui ne font pas appel au travail forcé. Ce retrait porte un sérieux coup à la marque qui se veut pionnière dans la lutte contre le travail forcé. "Il s'agit également d'un bel exemple de boomerang branding", souligne Thiery Cattoir, branding architect de Remarkable Europe. 

Le concept de Tony's Chocolonely (appelé aussi Tony's), d'origine néerlandaise, doit son succès grâce aux consommateurs conscientisés par l'engagement en faveur du commerce équitable. Il y a moins d'un mois, la presse expliquait que Tony's proposait une version remaniée de barres chocolatées KitKat (Nestlé), Ferrero Rocher (Ferrero), Toblerone (Mondelez) et Twix (Mars). Par cette action marketing, l'entreprise souhaitait mettre en évidence le fait que leurs collègues chocolatiers faisaient encore fort appel au travail forcé dans les plantations de chocolat. 

Il y a deux semaines, le Times expliquait que Tony's avait été banni de la liste éthique "Slave Free Chocolate". Des questions tournaient également autour du fondement même de cette liste, dirigée et contrôlée par un seul individu, qui opérait des vérifications par e-mail sans se rendre sur le terrain. Par ailleurs, Tony's a également fait référence au fournisseur Barry Callebaut, en souligne que l'entreprise ne peut toujours pas garantir du chocolat à 100% safe, à savoir non issu du travail forcé. 

"Ces pratiques éveillent de nombreuses questions en matière de droit des marques"

Je pense que ce genre d'approche aboutit très rapidement à ce qu'on peut appeler du boomerang branding. Il y a de nombreux autres exemples. Tout a commencé avec la communication sensationnelle et primée de Benetton, qui n'avait par ailleurs pas examiné ses propres méthodes de production. Cela s'est aussi poursuivi avec l'avènement de la publicité comparative. Ces pratiques éveillent de nombreuses questions en matière de droit des marques. On peut se baser à juste titre sur le droit à opérer de telles pratiques publicitaires et surtout sur les dommages ou même la confusion entre les différents droits des marques des chocolatiers mis en avant.

Depuis le début de notre siècle, les grandes entreprises alimentaires ont été les premières à être particulièrement conscientes du facteur de durabilité et des répercussions possibles des différentes parties prenantes. L'entreprise Barry Callebaut admet d'ailleurs humblement et en toute transparence qu'elle n'est pas encore en mesure d'atteindre cette garantie de 100 % aujourd'hui. Toutefois, les dirigeants annoncent vouloir atteindre cet objectif au plus tard en 2025. À l'échelle mondiale, il faut du temps pour transformer des biosystèmes et des modes de fonctionnement qui remontent parfois aux origines de l'esclavage. Cela est autant valable pour le secteur de l'énergie que du textile ou encore de l'alimentation.

Dans mon récent livre "Brand Change", des entrepreneurs témoignent de la façon dont ils travaillent quotidiennement pour pérenniser leurs marques en faisant de l'éthique et de la culture sous tous ses aspects le noyau obligatoire des valeurs de l'entreprise. La quadrature du cercle préserve ainsi le spectre de valeurs. Dans l'ordre, citons votre entreprise, votre gamme de produits, votre approche du consommateur et enfin votre rôle social dans le monde. Si ce n'est pas le cas, votre marque fera inexorablement faillite à court terme. Dans ce cas, travaillons tous ensemble. Faites en sorte que votre message original soit amusant, apportez un produit génial et passez du temps dans votre propre magasin.