Doit-on encore présenter Fairebel – le lait équitable ? La marque, qui a célébré cette année ses 10 ans, a construit avec ses coopérateurs producteurs une véritable filière équitable dans les produits laitiers. Voici à présent que son modèle s'applique à d'autres productions agricoles, afin de permettre aux consommateurs de poser des choix à la fois locaux et éthiques dans d'autres catégories. Premier univers concerné : celui des fruits.

Nous sommes à Dalhem, dans le pays d'Aubel, en cette belle journée de juin. Xavier Laduron et Dominique Meyers nous accueillent avec un large sourire, à défaut de poignée de main, en cette période de déconfinement. Tous deux arborent une belle chemise blanche brodée du logo Fairebel, la marque du lait équitable. Ce n'est pourtant pas un verre de lait qu'ils nous proposent, mais un savoureux jus de pomme. Xavier produit des pommes et des poires ici-même, à Dalhem. Dominique produit ces mêmes fruits dans la toute proche région des Fourons, au Limbourg. Quel est donc le lien avec Fairebel – le lait équitable ? Xavier Laduron se charge de retracer la genèse du projet.

« Tout est parti d'une réunion agricole, voici deux ans. Tout un groupe de producteurs était présent, bien décidé à faire changer les choses en matière de soutien de la part du monde politique. Bizarrement, alors que le secteur des fruits était plongé dans une crise profonde, on ne trouvait que très peu d'arboriculteurs. De nombreux échanges intervinrent ce jour-là, aux delà des filières respectives des uns et des autres. En discutant avec Guy Frank, administrateur de Faircoop, la coopérative qui détient la marque laitière Fairebel – le lait équitable, nous nous sommes dits qu'on pourrait faire des choses ensemble. »

Fairebel

L'idée a mûri patiemment, comme le fruit sur la branche. Mais en octobre 2019, nos deux interlocuteurs du jour sont invités à rencontrer le Conseil d'administration de Faircoop. Quelle est donc leur idée ? L'essentiel de la production des arboriculteurs est commercialisé par les grossistes ou les criées, et 80% part à l'export. Mais ce marché dont la commercialisation est très – trop ? – concentrée a beaucoup souffert, et les producteurs avec lui : ravages climatiques, impact désastreux des sanctions européennes contre la Russie... Le résultat, c'est que depuis quelques années, les producteurs obtiennent à peine 70 cents par kilo de fruits triés, bien trop peu que pour assurer leur avenir.

Fairebel, ce n'est plus seulement du lait

Le modèle Fairebel – le lait équitable, qui a réussi à mobiliser et recruter des consommateurs autour d'une production laitière locale et équitable, intéresse nos producteurs fruitiers. Il pourrait leur permettre de valoriser correctement un produit belge de qualité, cultivé de façon digne. Et face à la tendance du marché qui tire toujours davantage les prix vers le bas, l'activité marketing menée par la coopérative a valeur d'exemple. « Quand l'équipe de Faircoop nous a demandé ce qui pouvait nous aider dans Fairebel – le lait équitable, audelà du  modèle équitable proprement dit, nous avons répondu la notoriété de sa marque et de son visuel. Erwin Schöpges, leur président, a d'abord éclaté de rire. Mais les membres de la coopérative Faircoop ont pourtant réfléchi avec nous et accepté de prendre le risque d'élargir la gamme de produits proposés sous leur marque. »

Notre proposition au commerce ? Des valeurs et des moyens pour les communiquer

La méthode utilisée pour valoriser la production fruticole fut la même que pour le lait. « Quel était le prix minimum nécessaire pour nous permettre de nous en sortir, autrement dit pour produire, pour assurer le niveau de qualité qu'on nous demande et lutter contre les effets du changement climatique ? Nous sommes arrivés au prix de 1 euro/kg de fruits triés, au lieu de 0,70 euro/kg. »

Fairebel

En rejoignant Fairebel – le fruit équitable, les arboriculteurs participent aussi à l'activité marketing de la marque. Sur chaque kg vendu, une quote-part de la marge est réinvestie dans la communication, une politique à laquelle nos producteurs de fruits belges croient dur comme fer. Le cas d'école est celui d'une pomme étrangère concurrente bien connue, valorisée à un prix très élevé, et dont ils considèrent que les pommes de chez nous n'ont rien à lui envier. Pour l'essentiel, la production se focalise autour des pommes Jonagold et des poires Conférence de premier choix, triées avec un soin jaloux, le meilleur de leurs récoltes.

Une opportunité pour les commerçants aussi

Le projet Fairebel – le fruit équitable a bien avancé depuis octobre dernier, en dépit de cette longue période de confinement qui n'a pas facilité la tâche. Le packaging est prêt : cartonnettes et caissettes sont imprimées, prêtes à attirer l'oeil du consommateur en rayon. Une quinzaine de coopérateurs, de Flandre comme de Wallonie, ont rejoint l'initiative, alors que son annonce est encore toute récente dans le secteur. L'objectif est bien d'ouvrir la coopérative à tous les arboriculteurs belges qui partagent le diagnostic et les valeurs de la marque, sachant que le métier compte 950 producteurs en Belgique. « En rejoignant la coopérative, chaque producteur s'engage à assurer un peu de temps à la représentation et promotion en magasin. Individuellement, cet effort est très raisonnable, de un à cinq jours de prestations par an à peine, selon le nombre de parts de coopérant. Il est aussi valorisé et compensé. Mais l'essentiel n'est pas là : cette activité de promotion en magasin est décisive pour faire connaître la marque et recruter des clients. Elle nous permet aussi, en tant que producteurs, de nous reconnecter directement avec les consommateurs et les commerçants. »

Des produits locaux de grande qualité, équitables, soutenus par un marketing efficace, et assurant une rémunération correcte à chacun. Tout ce que réclame le consommateur actuel !

Xavier Laduron

Cet effort de promotion qui a fait ses preuves dans le lait a effectivement toutes les chances de scorer aussi pour les fruits, dans un contexte Covid-19 qui a poussé le consommateur à réclamer davantage de produits qui soient à la fois locaux et solidaires. Xavier Laduron et Dominique Meyers en sont convaincus : pour les commerçants aussi, Fairebel – le fruit équitable représente une belle opportunité : « Celle de proposer à leur clientèle des produits locaux de grande qualité, portés par le marketing d'une marque bien connue, assurant une rémunération correcte aux producteurs, soit tout ce qui s'inscrit dans les tendances dont les études récentes ont montré qu'elles correspondaient à une demande insistante du consommateur. » Les contacts sont en cours avec les centrales des distributeurs belges, et l'une des principales a déjà communiqué son accord de principe.

En rayon dès septembre

La prochaine étape est celle de l'arrivée en rayons, prévue en septembre, au moment de la cueillette de la nouvelle récolte. Une étape tout aussi importante pour les arboriculteurs belges que pour Fairebel – le fruit équitable, dont la marque apparaîtra pour la première fois sur des produits agricoles non laitiers. Une première, mais qui ne restera pas sans suite : d'autres produits frais seront bientôt concernés. Mais c'est une autre histoire, sur laquelle nous reviendrons bientôt...

Gondola Magazine

Cet article est tiré de l'édition de juillet-août de notre Gondola Magazine. Vous souhaitez découvrir d'autres articles ? Souscrivez dès à présent un abonnement !

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