Commander ses courses en ligne est de plus en plus populaire aux Pays-Bas. Le plafond n'est certainement pas encore atteint. Mais comme les coûts de livraison à domicile restent élevés, les prix dans les magasins physiques devront aussi augmenter, estime Jan-Willem Grievink du Foodservice Instituut.

Les achats en ligne auprès des supermarchés connaissent aux Pays-Bas une croissance significative ces dernières années. Près de 3 millions de consommateurs ont commandé dans un supermarché en ligne l'année dernière aux Pays-Bas. C'est plus d'un Néerlandais sur cinq, soit presque le double par rapport à 2016. De plus, pas moins de 1,3 million de Néerlandais achètent désormais chaque semaine dans les supermarchés en ligne. Cette popularité croissante oblige les supermarchés à investir dans la distribution.

Albert Heijn, par exemple, vient d'annoncer l'ouverture de deux nouveaux 'Home Shop Centers' pour la livraison à domicile. Ils seront situés à Bleiswijk (près de Rotterdam) et à Oosterhout (près de Nimègue). Ils complètent un réseau en pleine expansion, qui comprend déjà des centres de livraison à domicile à Amsterdam, Almere, Eindhoven, Rotterdam et Utrecht.

Picnic (un ‘pure player’) investit lui aussi beaucoup dans la distribution. Le supermarché en ligne a récemment levé pas moins de 250 millions d'euros auprès d'investisseurs et d'ABN Amro pour construire un centre de distribution de 42.000 m2 à Utrecht. L'installation sera en grande partie robotisée. Le tri et l'emballage le seront notamment entièrement. Toutefois, près de 1.000 personnes y seront encore employées.

Personne ne gagne de l'argent avec des courses en ligne

Bien qu'aujourd'hui un Néerlandais sur cinq fasse régulièrement ses courses en ligne, la valeur de celles-ci ne représente que 4 à 5% de la valeur totale des courses. Selon un récent rapport du Foodservice Instituut, la croissance des courses en ligne se poursuivra pendant un certain temps encore. Mais jusqu'à présent, pas une seule entreprise n'en a retiré des bénéfices. "Même si les détaillants en ligne gagnent un peu d'argent en vendant des données et ou en testant de nouveaux produits, la formule atteint ses limites. Le consommateur devrait payer les frais de logistique et de distribution, mais personne n'ose l’imposer. C'est pourquoi nous pensons qu'il y aura une sorte de limite naturelle pour les achats en ligne. Nous l’estimons à 9 ou 10% de part de marché en 2030", indique le rapport.

Selon Willem Grievink, un expert de cet institut, il sera très difficile de rentabiliser la livraison de courses en ligne. "Pour les produits à marge relativement forte comme le non-food il est déjà difficile de faire des bénéfices. Les marges sont plus faibles pour l'épicerie, de sorte qu’il est donc encore plus difficile de gagner de l'argent dans ce segment", dit-il.

Plus de robots

Le coût logistique élevé des courses en ligne ne réside pas seulement dans le dernier kilomètre, mais aussi, et peut-être surtout, dans le processus de préparation des commandes dans le centre de distribution. Dans un magasin physique, les clients retirent eux-mêmes les produits des rayons, mais dans un entrepôt, il faut payer du personnel pour le faire. A moins que, comme Ocado en Grande-Bretagne, on ne s'engage dans une robotisation poussée. Selon certains experts, il devrait être possible, grâce aux robots, d'atteindre le seuil du 'break even' ou même de faire un très petit bénéfice.

Des prix plus élevés

Selon Willem Grievink, les pertes liées aux commandes en ligne sont actuellement compensées par les clients de magasins physiques. "Mais si la part de marché des commandes en ligne augmente, il faudra bien que les livraisons deviennent rentables à un certain moment. Il faudra donc augmenter les frais de livraison".

"Une autre possibilité est d'augmenter les prix des produits en ligne. Et comme les prix des achats en ligne et des magasins physiques sont généralement identiques, il est probable qu'ils augmenteront dans les magasins physiques également". Il s'attend à une lente augmentation des prix de 5 à 10% entre 2025 et 2030. 

Autre modèle de rémunération 

Willem Grievink estime par ailleurs que le ‘business model’ d'Albert Heijn et de Jumbo devra de toute façon changer. Il devra inclure de nouveaux services. Ce processus sera stimulé par l'arrivée d'Amazon aux Pays-Bas. Il insinue même que Picnic pourrait être repris par le géant américain.