Outre la neutralité carbone, le recours au plastique recyclé figure souvent en bonne position sur la liste des objectifs environnementaux prônés par les grands acteurs du retail, supermarchés et multinationales en tête. Une tendance lourde qui n’est pas sans effets pervers.

Colruyt, Carrefour, Delhaize… Les produits dont les emballages sont fabriqués à partir de plastique recyclé se sont multipliés ces derniers temps dans les rayons des supermarchés. Même des géants comme Coca-Cola ou Nestlé, qui font pourtant partie des plus gros pollueurs de plastique au monde, s’y mettent et accumulent les promesses en matière de réduction de l’utilisation de plastique vierge. Le premier s’est par exemple engagé à utiliser 50% de matériaux recyclés dans ses bouteilles et canettes d'ici 2030, tandis que le second a promis de porter à 50% la quantité de polytéréphtalate d'éthylène recyclé (ou rPET) utilisé par ses marques et à rendre tous ses emballages recyclables ou réutilisables d'ici à 2025. En quelques années seulement, le plastique recyclé est devenu un élément pratiquement incontournable des stratégies des entreprises en matière de durabilité (et de marketing). Bouteilles, récipients alimentaires, tissus en polyester, matériaux de construction, meubles… Il faut dire que ses applications sont nombreuses, tout comme ses avantages pour l’environnement. On notera notamment une moindre dépendance vis-à-vis du plastique vierge à base de pétrole et moins d'émissions de gaz à effet de serre et de pollution en général. Mais de par son ampleur, cette tendance de fond, encore renforcée par les nouvelles législations en la matière, n’est pas sans effets pervers, notamment sur les prix.

Une double raison

En Belgique, Fost Plus organise et finance la collecte sélective, le tri et le recyclage des emballages ménagers (PMC, papier-carton et verre). « En 2020 nous avons recyclé 94,9% des emballages ménager mis sur le marché, dont 51% des emballages en plastique. Des chiffres qui nous placent dans le peloton de tête en Europe, en avance sur les objectifs belges et européens », explique Valerie Bruyninckx, responsable communication de l’ASBL, qui précise toutefois que le marché global des plastiques est beaucoup plus large que les emballages ménagers puisqu’il existe d’autres filières (parcs à conteneurs, industries, etc.). « Nous constatons une tendance à la hausse des prix de presque tous les matériaux, y compris les plastiques, sur les marchés internationaux », poursuit-elle. « La raison de cette augmentation est double : d’une part, l’économie reprend et la demande pour des matières premières et secondaires est en croissance après une période marquée par la crise sanitaire, et d’autre part, l’industrie opte de plus en plus pour des matériaux recyclés. »

De là à craindre des problèmes d’approvisionnement en plastique recyclé pour les entreprises au cours des prochaines années, il n’y a qu’un pas… que Valerie Bruyninckx ne franchit toutefois pas. « L’offre et la demande en matériaux recyclés sont deux éléments qui se tiennent de façon réciproque. Il n’y a pas que la demande qui s’accroit, l’offre augmente également. Grâce à l’extension du message de tri, qui est devenu effectif pour tous les ménages et toutes les organisations belges, nous collecterons à l’avenir 90.000 tonnes d’emballages en plastique supplémentaires chaque année pour le recyclage. Et dans la foulée, nous avons créé de nouvelles filières de recyclage pour tous ces nouveaux types d’emballages. »

100% recyclé ne veut pas dire 100% recyclable

Autre limite de la ruée vers le plastique recyclé : 100% recyclé ne veut pas dire 100% recyclable. Les bouteilles fabriquée à base de rPET, par exemple, ne sont pas recyclables à l'infini. À chaque cycle de recyclage, il y a une perte. Ce qui signifie que du plastique vierge doit être incorporé dans le système pour qu’il puisse demeurer à somme nulle. Enfin, les déchets en plastique recyclé demeurent des déchets. Lorsqu’ils échappent à la filière du recyclage, ils constituent aussi une source de pollution. Une bouteille recyclée jetée dans la nature polluera toujours l’environnement, les vêtements en polyester recyclé libèrent également des microplastiques dans les océans à chaque lavage... Face à ces multiples limites, certaines entreprises pourraient par conséquent être tentées de revenir sur leurs engagements au cours des prochaines années...