Les retailers néerlandais parviennent facilement jusqu’à nous, mais l’inverse fonctionne nettement moins bien. Pourquoi les retailers belges ne s’installent-ils pas aussi facilement aux Pays-Bas ?

Aller aux Pays-Bas n’est pas aussi évident pour les retailers belges. Il y en a qui sautent le pas, mais ils ne sont pas nombreux. Colruyt est le seul food-retailer à avoir sérieusement envisagé de passer la frontière, mais y a finalement renoncé. Miser sur le prix n’allait pas de soi, puisqu’aux Pays-Bas, les prix sont bas et les marges bénéficiaires limitées. Il est difficile de se tailler une place, surtout dans le food-retail. Le spécialiste du retail Cor Molenaar l’explique : “Albert Heijn est énorme aux Pays-Bas. Jumbo ressemble très fort à Albert Heijn, tant sur le plan de la qualité que de l’approche. Aldi et Lidl, qui sont un peu moins chers, penchent aussi vers Albert Heijn. C’est la norme. Colruyt veut proposer les prix, ce qui ne plaît pas aux Pays-Bas. On observe la même chose avec des formules venant d’Allemagne. Elles ne parviennent pas à générer le ressenti que l’on trouve chez Albert Heijn ou Jumbo. Elles doivent proposer un assortiment néerlandais, à un niveau de prix auquel nous sommes habitués. Sauf que c’est loin d’être évident. Il n’y a quasiment pas de marge pour proposer des prix aussi avantageux ou plus avantageux. Pour le consommateur néerlandais, tout est question de prix. Quand ils font des achats, les Néerlandais regardent le prix, avec froideur et pragmatisme. C’est pour cela aussi qu’ils sont moins fidèles aux magasins.” Joeri Sanders (Action) évoque le peu d’opportunité : “Le marché du retail néerlandais est déjà bondé, la lutte y est très rude. Il est difficile d’encore y trouver un petit trou en tant qu’acteur étranger. Surtout quand les prix sont déjà très serrés. Le prix le plus bas est le fondement du concept de Colruyt ; il est extrêmement difficile de le maintenir aux Pays-Bas. S’implanter aux Pays-Bas n’est facile pour aucun acteur.”

Des possibilités pour le non-food

Si dans le food-retail, il est quasiment impossible d’arriver sur le marché néerlandais et d’y entrer en concurrence, c’est une autre paire de manches dans le secteur de la mode, par exemple, déclare Molenaar. “Le rôle de l’assortiment y est nettement plus important. Vous pouvez davantage vous distinguer sur ce plan-là. Mais ça n’en reste pas moins très difficile. Vous tombez dans une lutte concurrentielle de magasins qui sont organisés par localisations. Pour les retailers belges, venir aux Pays-Bas et obtenir la même visibilité requiert un investissement considérable. J’ai discuté avec plusieurs retailers belges qui m’ont demandé comment aborder le marché néerlandais. Ils ont commencé avec une implantation, puis deux, puis trois, et puis ils se sont arrêtés. Ils sont venus aux Pays-Bas et ont réussi, sauf qu’ils ont nettement moins d’implantations que prévu.” Erik-Jan Mares (CEO de Zeeman) : “Ce n’est certainement pas facile. Les Néerlandais regardent fort aux dépenses mais veulent tout en même temps. Ils veulent à la fois du bon, du bon marché et du durable. Je ne vois personnellement aucune raison pour laquelle certains solides retailers belges ne pourraient pas réussir aux Pays-Bas. Je pense, sans vouloir citer de noms, aux retailers qui allient prix serrés et excellente qualité.” Pour Raf Van den Heuvel non plus, il n’est certainement pas impossible pour un retailer belge de s’installer aux Pays-Bas. “Je pense que les Pays-Bas sont un pays très ouvert, avec des gens très ouverts, le problème ne vient certainement pas de là. Si nous avons une bonne histoire en Belgique, elle peut certainement aussi s’écrire là-bas. J’en suis convaincu. Les Pays-Bas ne sont pas un pays verrouillé.”

Gondola Magazine

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