Depuis la semaine dernière, l’offre cosmétique de Zalando est disponible en Belgique. L’occasion, pour Gondola, de rencontrer Kenneth Melchior, Directeur Europe du Nord de l’e-commerçant. Il nous parle de l’évolution de la plateforme et des innovations à venir. Celui-ci interviendra le 16 mai prochain, lors du Gondola Day.

Comment Zalando a-t-il évolué en termes d’interaction avec le client?

En observant le développement de Zalando, je constate qu’un grand changement s’est produit. Si, dans le passé, nous nous concentrions sur la visibilité et l'ajout de nombreuses nouvelles marques et produits, nous nous concentrons désormais davantage sur l'inspiration. Aujourd’hui, nous avons près de 2.000 marques et environ 300.000 références : en d'autres termes, nous avons une sélection fixe. Mais il est parfois difficile de créer de l'inspiration.

Ce qui me paraît justement intéressant: nous travaillons avec des sources d'inspiration, ou des dits ‘influenceurs’, qui prennent de plus en plus d'importance de nos jours. En Belgique, par exemple, nous avons maintenant un programme d'ambassadeurs. Dans ce cadre, nous travaillons avec 8 à 10 influenceurs locaux populaires qui composent chacun 3 tenues, après quoi les clients peuvent acheter leur look. Nous en avons aussi une version technologique : l'"Algorithmic Fashion Companion", comme nous l'appelons.

Toutes ces initiatives entraînent un changement important. Après tout, nous recommandons un certain nombre de tenues aux consommateurs et nous les aidons vraiment à trouver le look qui leur convient. Bien sûr, il y a aussi la personnalisation en général. Cela accélère le processus de changement. Si vous êtes en Belgique, par exemple, nous vous recommandons certaines tenues, nous vous envoyons des e-mails en fonction du segment auquel vous appartenez... Nous guidons ainsi nos clients encore mieux qu'auparavant.

Cette guidance fait également référence à vos services…

Oui, en plus de cette personnalisation, il y a bien entendu nos services supplémentaires. Nous voulons aider nos consommateurs avec ce que j'appelle la partie « unwanted sizing ». Dans notre cas, il s'agit toujours de mode et c'est pourquoi nous voulons que nos clients essaient de nouvelles choses, commandent de nouveaux produits et se sentent bien dans leur peau. Mais cela demande également qu'ils décident eux-mêmes si les produits que nous leur proposons leur conviennent ou non. Par exemple, si une femme achète des chaussures, mais achète elle-même la mauvaise pointure et que, grâce à nos conseils, commande 3 ou 4 paires supplémentaires, que nous pensons légèrement plus étroites ou légèrement plus grandes et donc mieux adaptées à son pied, et qu’elle trouve finalement chaussure à son pied, alors nous avons réussi dans notre mission.

Il y a vraiment un changement visible : passer d'une première sélection à l'inspiration et aider le client à gagner le plus de temps possible.

Qu'en est-il du consommateur lui-même ? Comment évolue-t-il ?

Les attentes des clients augmentent. Fort heureusement! Car il est tout aussi intéressant de devoir continuellement trouver quelque chose de nouveau et essayer de garder une longueur d'avance sur leurs attentes.

L'activité e-commerce connaît une croissance rapide, tant en Belgique que dans le reste de l'Europe. Nous constatons que certains marchés sont aujourd'hui un peu plus matures que la Belgique, de sorte que les exigences varient d'un pays à l'autre. Mais une chose est certaine : les exigences du consommateur seront toujours plus élevées. C'est fascinant, parce qu'en fin de compte, c'est toujours le consommateur qui gagne. Après tout, nous devons répondre à leurs besoins et cela, bien sûr, demeure un nouveau combat pour nous à chaque fois.

Vous avez indiqué que le commerce électronique se développe de plus en plus rapidement et devient donc de plus en plus compétitif. Votre modèle est-il adapté pour survivre 20 ans ?

D'une manière générale, je pense que notre modèle économique fonctionne très bien et qu'il survivra certainement à l'avenir, c'est pourquoi nous avons mis en place notre plateforme. Je pense même pouvoir dire que nous vivons une véritable success story : nous sommes la première entreprise à avoir réussi à encaisser 1 milliard d'euros en six mois. Nous avons grandi très vite, et ce, dès le départ. Un résultat dont nous étions non seulement très satisfaits, mais que nous entendons poursuivre à l'avenir. En outre, il était également important pour nous qu'en plus d'une croissance rapide, nous puissions également aller loin ensemble, même si, bien sûr, cela doit être fait de la bonne manière. C'est pourquoi nous avons considérablement élargi notre plateforme, qui est devenue entre-temps l'écosystème de la mode en Europe.

Grâce notamment à notre programme de partenariat, il est possible d'offrir beaucoup plus de marques. De plus, nos services facilitent grandement la croissance. Bien que nous venions de loin, nous avons maintenant un peu plus de 0,1% du secteur de la mode dans nos mains. Nous avons donc encore beaucoup de marge de manœuvre pour grandir. Le Comité exécutif a également de grandes ambitions, comme vous l'avez vous-même entendu lors de la présentation de nos chiffres annuels fin février.

Grandir, signifie-t-il également ouvrir des magasins physiques ?

Nous voyons une grande opportunité ici parce que près de 90% des magasins sont hors ligne. Bien que beaucoup de gens pensent que vendre des produits en ligne est plus facile, ce n'est pas le cas. Après tout, il faut avoir un savoir-faire technologique, il faut faire du marketing en ligne, etc. C'est pourquoi nous avons consciemment opté pour le " retail connecté ", dans lequel nous combinons le retail en ligne et hors ligne. Grâce à ce concept, nous pouvons faciliter les achats en ligne de nos clients et leur offrir plus de commodité en leur proposant un large éventail de marques, mais nous offrons également aux marques un accès direct à nos 26,4 millions de clients.

Nous avons déjà largement testé le concept de retail connecté en Allemagne et nous avons maintenant 600 magasins connectés à notre plateforme. Cela va des magasins Adidas aux petits magasins qui n’ont jamais été actifs en ligne. Aujourd'hui, nous étendons le concept aux Pays-Bas. Peut-être le testerons-nous ensuite en Belgique, ce qui nous permettrait de voir comment améliorer notre modèle économique et poursuivre notre croissance. Il y a par exemple encore beaucoup de trafic maritime entre l’Allemagne et la Finlande. Mais si, par contre, vous êtes client et habitez Anvers, vous pouvez venir cherche le colis directement en ville.  Ceci apporte de nombreux avantages en termes de retours et de gain de temps. Je pense donc qu'il existe de nombreuses façons d'élargir notre modèle.

Vous dites réunir le retail hors ligne et en ligne, mais qui, et surtout, quel canal est votre plus grand concurrent ?

Je ne sais pas si nous avons vraiment un grand concurrent. Nous avons plusieurs concurrents à travers l'Europe. Certains sont plutôt locaux et régionaux, ce sont donc plus souvent des magasins physiques qui ont une plus grande part de marché, alors que d'autres acteurs sont très puissants en ligne. Je ne peux donc pas donner une réponse sans ambiguïté : après tout, ce sont tous des concurrents, et nous pouvons certainement apprendre beaucoup de chacun d'eux. Cette concurrence est également bonne. Cela garantit que le marché en ligne continue à se développer et nous oblige à constamment nous remettre en question.

Vous venez de mentionner le retail connecté. Dans quelle mesure travaillez-vous avec les marques ?

Dans ce métier, vous devez faire plus que simplement montrer les marques sur votre plateforme et il est important que vous travailliez en étroite collaboration avec elles pour faire de votre plateforme un succès. Il est essentiel qu'en tant que plate-forme, vous compreniez que les marques placent leur propre marque au centre, car c'est la seule façon de développer une collaboration en profondeur. Cela semble très logique, mais de nombreuses plateformes osent parfois l'oublier. Nous nous en sortons très bien dans ce domaine : nous avons une relation très étroite avec les marques de notre plateforme. Et c'est bien sûr un bon point de départ.

Ce qui est également très important, en termes de marketing, c'est que nous offrons différentes solutions marketing Zalando. De cette façon, les marques peuvent également acheter et utiliser nos outils de campagne. En d'autres termes, nous les aidons très méticuleusement dans la mise en place de leurs campagnes. Parce qu'avec de nombreuses marques, nous voyons que la mise en place de campagnes est souvent quelque chose de nouveau pour eux, alors que nous avons beaucoup d'expérience dans ce domaine. Il y a ici un véritable échange de connaissances.  De la même manière, en termes d’achat de produits, nous disposons d'une énorme quantité de données qui peuvent être très utiles pour les marques.

Ces données sont-elles partagées avec les marques ?

Non, mais de temps en temps, nous examinons les données et pouvons conseiller les marques sur base de celles-ci. Par exemple, si un certain look ne fonctionne pas, nous pouvons informer les marques et, sur la base de nos données, nous pouvons leur expliquer les raisons possibles. Nous les aidons donc vraiment à développer leurs collections.

Certaines grandes marques sont impressionnées par le nombre de modèles  dont nous disposons et par notre niveau d'avancement ; elles voient donc certainement l'avantage de travailler avec nous. Bien sûr, cela s'applique aussi à nous, parce qu'ils apprennent autant de nous que nous apprenons d'eux. En effet, nous apprenons nous aussi de leur bons contenus. Il s’agit donc selon moi d’un excellent partenariat.

Autre chose : depuis la semaine dernière, la gamme de produits cosmétiques a fait son apparition sur la plateforme belge de Zalando.

En effet. L'année dernière, nous avons lancé notre gamme de produits de beauté en ligne en Allemagne, puis nous l'avons étendue à la Pologne et à l'Autriche. Et depuis quelques semaines, notre gamme est également disponible au Danemark, en Suède et depuis la semaine dernière en Belgique et en France.

Nous y proposons environ 200 marques, pour un total de 6000 produits, tant pour les hommes que pour les femmes. Nous sommes très heureux de pouvoir lancer notre gamme sur de nouveaux marchés, dont l'Italie, qui suivra bientôt. Nous pensons que le marché belge offre certainement une opportunité, car nous observons que le marché en ligne y est désormais bien implanté. Il est peut-être encore petit, mais est en forte croissance. En tant que leader du marché de la mode, nous voulons capitaliser sur une position forte sur le marché belge de la beauté.

Vous voulez exploiter et conquérir de nouveaux marchés. Mais comment voyez-vous l'avenir de Zalando dans les 5 prochaines années ?

Nous avons encore plusieurs projets à lancer. Nous ne sommes certainement pas paresseux lorsqu’il s’agit développer de nouvelles choses. Notre objectif pour les années à venir est avant tout d'être " passionnant " et de poursuivre une croissance rapide.

Nous nous concentrons principalement sur l'extension de notre programme de partenariat et sur les différents services tels que Zalando Plus, et bien sûr aussi sur les solutions médias. Nous nous dirigeons vers une période chargée. Nous lançons aujourd’hui notre gamme de produits de beauté sur différents marchés, et nous devons donc certainement bien préparer cette expansion. Nous voulons également continuer à nous concentrer sur notre plateforme en offrant plus de commodité et en répondant encore mieux aux attentes des consommateurs. Et tout cela tandis que nous élaborons de nouveaux plans pour des marchés comme la Belgique.

Je ne sais pas encore si cela signifie que nous allons pénétrer de nouveaux marchés et ajouter de nouveaux " produits émotionnels " comme les cosmétiques à notre gamme. Aujourd'hui, nous restons concentrés sur le déploiement de notre gamme de produits cosmétiques en ligne sur d'autres marchés.

Zalando Plus, dont vous venez de parler, pourrait-il faire son entrée en Belgique?

Nous cherchons toujours à savoir si nous pouvons étendre le service Zalando Plus à d'autres marchés, car il s’agit très certainement d’une opportunité intéressante. Nous l'avons lancé en Allemagne et l'avons ensuite étendu à la Suisse et à l'Italie. Je peux vous assurer qu'en tant que responsable pour la Belgique, j'essaie de convaincre tout le monde de l’intérêt d'étendre également le service à la Belgique, mais nous le ferons étape par étape. Pour l'instant, rien de concret n'est prévu.

Tant qu’à parler d’avenir, Nous ne pouvons passer outre le sujet du moment: l’intelligence artificielle. Comment Zalando l'intègre-t-il exactement ?

Avec Zalando, nous nous concentrons fortement sur l'intelligence artificielle. C’est le cas, par exemple, de notre Algorithmic Fashion Companion. Nous utilisons ici clairement l'apprentissage machine et l'IA pour répondre aux besoins de nos clients. La partie  « sizing » est également très importante.

Mais ce n'est pas tout, nous réalisons différents tests visant à déterminer ce que nous pouvons développer pour mieux répondre aux attentes du client. A la fin de l'année dernière, par exemple, nous avons réalisé un projet pilote en Belgique dans le cadre duquel nous avons testé la livraison des produits directement chez le client grâce à une sonnette intelligente. Notre objectif principal était de vérifier si les gens sont prêts à laisser des étrangers chez eux pour se faire livrer des produits. C'est aussi un moyen d'étudier comment les gens réagissent aux nouveaux services/produits, ce qu'ils aiment, ce qu'ils craignent, ce que nous pouvons améliorer...

Les résultats du projet pilote étaient déjà très positifs, mais nous devons encore évaluer s'il est réellement possible de le mettre en œuvre et de l'étendre dans le reste de la Belgique. Il est toujours bon d'évaluer si un public est vraiment prêt pour de nouvelles choses. De tels projets pilotes verront encore jour à l'avenir. Cela ne signifie pas que tous ces tests seront automatiquement utilisés dans la réalité. Certaines expériences ne servent qu'à l'apprentissage ou au suivi de certains développements.

Quel regard portez-vous sur la robotique?

Nous disposons déjà de robots dans nos entrepôts. Ils y sont, par exemple, utilisés pour atteindre des produits qui se trouvent assez haut sur les étagères, car ils sont difficiles d’atteinte pour les employés. Ces robots sont là pour aider nos travailleurs. Mais si vous parlez de robots utilisés dans le cadre de la livraison de produits, aucun plan n’est encore à l’étude…

Une dernière question d'actualité pour conclure. Qu’en est-il du Brexit ?

Je suis également responsable du marché britannique, je suis donc tout cela de très près. Nous assistons à une croissance énorme au Royaume-Uni et j'espère, bien sûr, que nous pourrons la poursuivre. Nous avons examiné tous les scénarios possibles. Je pense que, comme le reste du monde, nous gardons un œil attentif sur tout, mais quoi qu'il arrive, nous sommes prêts pour ce qui arrive !