Colruyt s'exprime dans le débat suscité par le conflit social chez Delhaize. Dans une lettre adressée au ministre de l'Economie et du Travail Pierre-Yves Dermagne (PS), le groupe de distribution demande une plus grande égalité salariale pour tous les travailleurs du secteur et une simplification des commissions paritaires.

Le projet de Delhaize de scinder ses 128 magasins continue de susciter des tensions, y compris à l'extérieur de l'entreprise. Lors du conseil d'entreprise extraordinaire d'hier, outre les travailleurs de Delhaize, des sympathisants issus des rangs du personnel de Colruyt et de Carrefour étaient présents pour manifester leur soutien. Quant au groupe Colruyt lui-même, il publie à présent une lettre adressée au ministre de l'Économie et du Travail, Pierre-Yves Dermagne, dans laquelle il demande une réduction des différences au sein des commissions paritaires du secteur.

Colruyt rejoint ainsi partiellement la position des syndicats, qui réclament également une plus grande égalité en matière de salaires et de conditions de travail.

Nous publions intégralement la lettre ci-dessous.

"Le retailer belge que nous sommes est préoccupé par la diversité des commissions paritaires qui existent aujourd'hui. En tant que famille d'entreprises ayant des formules intégrées (Colruyt Lowest Prices, OKay...) et indépendantes (Spar), nous plaidons en faveur d'une forte simplification du paysage des commissions paritaires dans le retail. L'essentiel pour nous, en tant qu'entreprise, est de parvenir à un paysage concurrentiel équitable en matière de salaires et de conditions de travail, dans lequel il y a et il reste toujours de la place pour les deux formules, tout en empêchant les abus. Cela profiterait à la fois aux travailleurs et aux entreprises de l'ensemble du secteur en Belgique. Nous croyons fermement en une situation où les deux modèles offrent une valeur ajoutée aux clients belges et à la société, et peuvent donc parfaitement coexister." 

"Nous pensons qu'aujourd'hui plus que jamais, il est temps de remettre en question et d'ajuster une situation historiquement biaisée. Sinon, le modèle du commerce intégré risque de disparaître à long terme. Nous n'allons pas nous prononcer individuellement aujourd'hui sur le nombre de commissions paritaires qu'il devrait ou ne devrait pas y avoir. Nous avons déjà fait savoir que nous étions favorables à la simplification, principalement pour garantir que la concurrence déloyale entre retailers ne puisse pas se produire (c'est-à-dire pour contrer les abus éventuels) en termes de salaires et de conditions de travail. Aujourd'hui, les entreprises peuvent s'organiser de manière à relever de la CP 201, destinée aux très petits indépendants. Ceci leur permet d'adopter une forme juridique leur permettant de se scinder en entités plus petites, même s'il s'agit en réalité de plusieurs magasins exploités par un seul entrepreneur. Par conséquent, il ne s'agit pas de situations différentes des autres chaînes de supermarchés intégrées du secteur, qui emploient leur personnel à des salaires et des conditions de travail plus élevés. Cette situation est préjudiciable aux véritables petits indépendants : le boulanger, le boucher, le petit détaillant indépendant, mais aussi aux chaînes intégrées. "

"Les différences créent surtout une injustice sociale : des employés ayant la même fonction et les mêmes tâches dans un supermarché gagnent jusqu'à 400 euros de moins par mois lorsqu'ils appartiennent à la commission paritaire 201 plutôt qu'à la 202, soit une différence annuelle de 5000 euros bruts, ou encore 2 salaires mensuels par an. C'est difficilement justifiable. En outre, ces travailleurs ne bénéficient pas de tous les avantages pour lesquels le gouvernement fixe le cadre (prime corona, prime à l'énergie, droit à la formation, entre autres), car les petites entreprises sont souvent exclues de ces mesures sur la base du nombre d'employés."

"La manière dont cette simplification des commissions paritaires devrait se dérouler dépend de nombreux facteurs qui devront être examinés avec plusieurs parties. Quoi qu'il en soit, nous demandons ensemble des conditions de concurrence équitables pour tous les acteurs du secteur."