Alliance reconduite pour 15 ans autour de Shop&Go, qui vise 10 à 15 nouvelles ouvertures annuelles.

Delhaize et le pétrolier Q8 viennent de fêter leurs noces de cristal - 15 ans de mariage - de la plus belle des façons: en renouvelant cette alliance pour un nouveau bail de 15 ans. Mieux: ils avaient pris pour témoins deux journalistes, dont votre serviteur. Compte-rendu d’une conversation avec Koen Vankelst, Retail Director Q8, et Lionel Desclée, Senior Vice-President Affiliated Retail, New Markets & Real Estate chez Delhaize Belgium. Une rencontre qui nous a permis de faire le plein, d’infos bien entendu.

Quinze ans déjà ! Comme le temps passe: l’annonce du partenariat noué en 1999 par Delhaize et Q8 avait fait sensation, il consacrait le rapprochement de deux univers jusque là assez étrangers. “La fin des années ‘90 fut un moment-clef, où beaucoup de choses évoluèrent sur notre marché. C’est à cette époque que Q8 reprit les parcs de pompe à essence de BP et de Aral. Mais c’est aussi à ce moment que démarra la croissance de l’offre alimentaire dans les shops liés à nos pompes, ce qu’on appelait alors convenience stores” rappelle Koen Vankelst. Quinze ans plus tard, cette terminologie est moins utilisée. Peut-être parce que ce canal de vente s’est imposé comme un format de retail à part entière. “Delhaize accueille chaque semaine 4,5 millions de clients dans ses magasins, tous formats confondus, un record pour le marché belge. Mais savez-vous que le réseau Shop&Go s’en attribue à lui seul un million?” signale Lionel Desclée, en insistant sur le fait que pour le client, les Shop&Go constituent autant de points de contacts avec l’image Delhaize et un assortiment où la marque propre est bien présente. De gros efforts ont d’ailleurs été entrepris par le pétrolier, qui a intégralement renouvelé les systèmes hardware et software de ses pompes pour que le client venu prendre du carburant puisse y lire la carte-plus et recevoir les points qu’elle attribue. Cette meilleure intégration du programme de loyalty permet désormais de développer des actions de cross marketing, comme celle toute récente qu’évoque Koen Vankelst: “Nous nous sommes adressés à des clients de Delhaize (Delhaize supermarchés, AD ou Proxy), qui habitaient dans une zone proche d’une pompe Q8 sans la fréquenter, en leur proposant 250 points-plus en cas de visite. Nous avons enregistré 10% de rédemption, un score bien au-delà des performances que rencontrent de telles offres de marketing direct.”

Une croissance soutenue

Mais Shop&Go ne comporte pas que des magasins de stations-service: sur les 135 points de vente que compte le réseau, 108 sont expoitées avec Q8. Le solde, ce sont des magasins “stand alone” qui se développent aujourd’hui dans les stations de métro ou en ville. Point commun à ces différents cas: ils représentent des endroits de passage fréquentés. Si l’offre s’est beaucoup enrichie en quinze ans, le niveau du panier moyen, bien qu’en progrès, reste compris entre 5 et 7,5 euros. Mais c’est le débit qui s’accélère et permet une croissance annuelle de l’ordre de 10%, dopée par un joli +11% en nombre de visites (2015 vs. 2014) ! Des indicateurs d’autant plus favorables qu’il reste manifestement une marge plus que confortable pour un développement du réseau. “Au cours des 5 ans à venir, nous envisageons d’ouvrir de 10 à 15 nouveaux points de vente par année”. Voila qui situe aussitôt à leur niveau les ambitions du couple Q8-Delhaize, manifestement surtout unis pour le meilleur. L’alliance qu’ils forment est cependant ouverte à d’autres acteurs, comme Nespresso, qui fournit le coin-café, et Panos, qui signe le bake-off et la sandwicherie. “Ces partenariats ne cessent de se renforcer, et c’est l’exclusivité de cet engagement mutuel qui nous a tous rendus plus forts.”

Les aspects tendance? D’abord le plaisir: le client fait du passage dans le shop une pause où il cherchera de l’auto-indulgence. Mais aussi le service, avec des horaires d’ouvertures étendus: on compte déjà une vingtaine de magasins ouverts en 24/7. Une formule qui n’est pas seulement utile à la clientèle: elle est rentable, nous dit-on, et profitable en termes de gestion et présentation du magasin. “Aux heures plus creuses de la nuit, le personnel peut se charger de réassort ou mise en ordre. Les clients du matin arrivent dans un magasin dans un état optimal.”

De pompiste à épicier

En quinze ans de collaboration, les équipes ont appris à se connaître et à travailler ensemble. L’esprit du shop a bien changé, et le profil des indépendants qui l’exploite encore davantage. Un Shop&Go, ce n’est pas un supermarché de poche. C’est un concept répondant avec efficacité au besoin d’une clientèle de passage, accordé à chaque moment de consommation. Aux produits traditionnels que constituent l’impulse, le tabac, les drinks ou la presse se sont ajoutés la boulangerie, les solutions-repas, du frais, mais aussi une offre-cadeaux qui connaît une dynamique très importante: fleurs, pralines… Si l’assortiment moyen couvre de 2.200 à 2.500 références, tous les magasins ont en réalité accès à l’assortiment complet de Delhaize, s’ils le souhaitent ! Encore faut-il être armé pour le gérer, et c’est ici que le métier a le plus profondément changé: les pompistes sont devenus des épiciers à part entière. Delhaize les invite à son Food Show, les emmène à la découverte des sites de production de fournisseurs et leur dédie une équipe de conseillers très expérimentés qui assurent un précieux coaching. Pour ceux qui ont la vocation du commerce, Shop&Go peut représenter un excellent tremplin vers le métier, parce qu’accessible en termes de fonds propres.

On ajoutera aussi que les études de marché préalables à l’ouverture sont particulièrement fiables. Quand un magasin s’implante dans une des plus de 400 pompes que Q8 compte en Belgique (41 au Luxembourg, 185 stations-service automatiques sous la marque Tango aux Pays-Bas), il connaît déjà les statistiques de fréquentation de la station-service. C’est un réservoir de clientèle tout trouvé qui ne demande qu’à s’étendre, puisque seule une fraction des clients présents dans le shop se sont arrêtés pour du carburant. Et c’est tant mieux: l’autonomie des véhicules actuels ne provoquerait que des visites très occasionnelles. Delhaize a pris l’habitude de décrire la mission de Shop&Go sous une formule amusante: ses magasins ont de plus en plus vocation à devenir “le frigo de Monsieur tout le monde”. Et ce n’est pas le succès de la formule qui risque de le remettre en cause, ni de fragiliser le partenariat qui vient d’être reconduit.