La justice européenne a confirmé la condamnation de Google à payer une amende de 2,4 milliards d’euros pour abus de position dominante par le biais de son comparateur de produits ‘Shopping’. Une décision lourde de conséquences pour le groupe américain, mais également pour les autres acteurs impliqués, à commencer par les annonceurs et les retailers.

Le tribunal de l'Union européenne a rejeté la semaine dernière le recours introduit par Google contre l'amende de 2,4 milliards d'euros imposée en 2017 par Bruxelles pour pratiques anticoncurrentielles sur le marché des comparateurs de prix. La cour a confirmé que le géant américain de l'internet avait bien « abusé de sa position dominante en favorisant son propre comparateur de produits par rapport aux comparateurs concurrents ». Il reste au ‘G’ des GAFAM encore une dernière possibilité pour éventuellement contester cette décision, devant la Cour de justice de l'UE, mais uniquement sur la forme et non plus sur le fond de l’affaire. Ce dossier constitue l'un des trois gros contentieux ouverts par la Commission européenne à l'encontre de Google. Mis ensemble, ceux-ci totalisent 8,2 milliards d'euros d’amendes.

La porte est ouverte aux indemnisations

Bruno Van Boucq, à la tête de Proxistore, une société spécialisée dans la publicité numérique locale, rappelle que Google a également été condamné en juin dernier par l'Autorité française de la Concurrence à une amende de 220 millions d'euros pour abus de position dominante dans le secteur de la pub en ligne. « Là où les deux dossiers se rejoignent, c'est que dans un cas comme dans l’autre, cela ouvre la porte aux demandes d'indemnisation de la part des différents acteurs qui se sont sentis lésés par les pratiques du géant américain. Du moins ceux qui n’ont pas fait faillite entretemps… Et ces poursuites pourraient potentiellement coûter bien plus cher à Google que les 2,4 milliards d’euros infligés par l’UE. » Toute société qui se serait sentie victime pourrait donc théoriquement demander réparation, poursuit ce pionnier belge de la pub sur internet, dont l’entreprise prépare actuellement une telle demande. « Mais je sais de par ma propre expérience que Google étant présent dans tellement d'autres services, cela peut faire peur de porter plainte contre lui », ajoute-t-il. « Je pourrais par exemple comprendre qu’un groupe comme Carrefour, qui aurait différents contrats avec Google, puisse ne pas lancer une demande de réparation dans un dossier en particulier afin de préserver sa relation dans d'autres domaines. Ce genre de choses se produit depuis des années... »

« Ça valait la peine de se battre »

Pourtant, Bruno Van Boucq l’assure, il est important et utile de continuer à se battre pour défendre un environnement économique serein et une compétition honnête. « On pourrait être tenté de se dire que 50 millions par-ci, 2 milliards par-là, c’est peanuts pour un géant comme Google. Mais mine de rien, cela commence à s’accumuler un peu partout dans le monde. Sans oublier les pressions liées à un éventuel démantèlement. » Par ailleurs, le patron de Proxistore a pu constater très concrètement ce qu’il se passait lorsque la justice, en l’occurrence française dans ce cas-ci, parvenait à faire plier Google. « Le fait que le groupe américain ait été obligé d'ouvrir ses plateformes à la concurrence, cela a permis de donner de nouvelles options aux retailers en matière de publicité. Maintenant que je ne suis plus trompé par Google, je peux proposer à mes clients les mêmes tarifs, mais avec une technologie plus innovante. Et j’ai vu mon chiffre d'affaires exploser en conséquence. La situation d’abus ayant été identifiée et corrigée, je suis de nouveau dans la course. Cela valait donc la peine de se battre. Mais pour le même prix, j'aurais pu tomber en faillite… »