Attention: un nouveau magasin peut parfois en cacher un autre ! A peine avions-nous visité le nouveau point de vente de CRU dans le complexe “Kanaal” développé par Axel Vervoordt à Wijnegem qu’un autre magasin tout neuf attirait notre attention. A 100 mètres à peine du CRU, le boulanger français Poilâne vient en effet d’ouvrir sa première succursale belge.

Faut-il encore vous présenter Poilâne? Si la maison fut fondée en 1932 par Pierre Poilâne, c’est un de ses fils, Lionel, qui fit de la boulangerie parisienne de la rue du Cherche-Midi une adresse légendaire. Le secret? Une recette de pain au levain créée par son père, un attachement absolu aux gestes et à la patience de l’artisan, et un sens inné de la communication firent dès les années ‘80 de Poilâne la coqueluche du Paris gastronomique, et de Lionel Poilâne une personnalité aussi réputée que les grands chefs étoilés. Non seulement Poilâne ouvrit deux autres magasins à Paris, mais il se mit à exporter en Asie et dans le monde anglo-saxon les appétissantes miches de pain produites dans le grand atelier construit à Bièvres. En 2002, Lionel Poilâne et son épouse perdaient la vie dans un accident d’hélicoptère au large de la Bretagne. C’est sa fille Apollonia qui prenait à 18 ans à peine une succession difficile: assurer la pérennité de cette marque de prestige, dans un contexte d’autant plus douloureux qu’il s’agissait aussi pour elle de combattre les rumeurs - et tentatives de récupération posthume - prêtant à son père des sympathies pour le Front National, rumeurs qu’il avait lui-même démenties de son vivant.

Près de 15 ans après la mort de Lionel Poilâne, la 3e génération a manifestement bien veillé sur l’héritage familial: Poilâne emploie 180 personnes, produit chaque jour entre 5.000 et 8.000 miches de pain, exporte vers une quarantaine de pays, et réalise un chiffre d’affaires de 13,2 millions d’euros. Outre l’atelier de Bièvres et les trois magasins parisiens, Poilâne a ouvert deux magasins à Londres. Et depuis le 25 mai, son réseau compte une succursale en Belgique, à Wijnegem. Un choix d’implantation qui nous surprend de prime abord. Spontanément, c’est à Uccle, commune où résident tant de réfugiés fiscaux français, que l’on s’attendrait à voir apparaître une enseigne aussi prisée des Parisiens. C’est un choix d’Apollonia Poilâne, nous dit-on, séduite par Anvers, et par la qualité du projet “Kanaal”. Et favorisé aussi par l’amitié de longue date qui lie les familles Poilâne et Vervoordt.

Production sur place

Tout comme pour CRU, le magasin Poilâne se fait assez discret: pas de véritable enseigne, mais une grande photo en noir et blanc d’un boulanger au travail, qui tapisse la vitrine donnant sur la Stokerijstraat. Un parti-pris manifestement voulu pour respecter l’esprit - ou les contraintes - du langage architectural de Kanaal. A l’intérieur, la boutique décline fidèlement les éléments d’identité Poilâne, jusqu’à la blouse grise du personnel.

Plus important encore: Wijnegem n’est pas seulement un point de vente: un fournil, en tous points semblable à ceux de la France, y a été installé, et un boulanger belge y travaille suivant les mêmes méthodes, acquises après un écolage de plusieurs mois. Le four, alimenté au bois, y est allumé en permanence. Poilâne y produit non seulement les pains vendus en magasin, mais aussi ceux destinés à la clientèle belge existante. On sait en effet que plusieurs points de vente, comme Rob, ou encore le Carrefour express de Lasne, proposent à leur clientèle exigente les miches de pain frappées du monogramme “P”. Enfin, un responsable commercial a été désigné, avec pour rôle de développer le réseau de distribution, et notamment à travers les restaurants.

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