Le Gondola Academy Shopper & Trade Marketing Congress 2024 était consacré à l’IA, à l’espace en rayon et au futur des présentoirs. « La complexité de cette branche et les nombreux défis à relever vont bouleverser le secteur », a ainsi déclaré Pierre-Alexandre Billiet, CEO de Gondola Group, dans son introduction. Le congrès a permis aux spécialistes du marketing, du shopper marketing et du marketing commercial de se faire une idée de l’évolution qui attend le retail au cours des années à venir.

« Moins pour moins »

Tom Cornelis (CPS GfK) a souligné l’impact de l’inflation sur le comportement des consommateurs. La confiance des consommateurs s’est effondrée en 2020 et en 2022, et s’est à nouveau légèrement dégradée début 2024. Si elle ralentit, l’inflation reste supérieure à la moyenne (5%) dans l’alimentation. On notera qu’aux yeux des consommateurs, c’est avant tout à l’État qu’il revient de faire baisser les prix – les supermarchés et les fabricants n’arrivent qu’en deuxième et troisième position.

En 2023, les consommateurs ont accru leurs dépenses de 9%, mais acheté moins de produits (-1,3%). Ainsi, 78% des catégories ont enregistré une baisse des volumes en 2022, 50% une autre en 2023. Mais cela n’a pas empêché 12% des catégories de bénéficier d’une croissance en volumes deux années de suite (indulgence, substituts à la viande et produits plus économiques comme le poulet et les pâtes). De manière générale, Tom Cornelis constate un downtrading, bien que la fréquence des achats soit restée au niveau de l’avant-Covid. Et s’il reste de la place pour les marques premium, les private labels ne cessent de gagner du terrain : « Dans l’alimentation, leur part de marché augmente avec l’inflation. Les achats en ligne se stabilisent et le segment low end reste limité (0,7%), mais la tendance y est orientée à la hausse. »

Que se passe-t-il dans les magasins ?

Renaud Caeymaex, exploitant d’AD Delhaize Reyers & Merbraine, a dressé la liste des « détails » qui peuvent faire la différence en matière de rendement. Les présentoirs doivent être utilisés à bon escient. Misez sur la facilité d’utilisation et les grands volumes, évitez d’y placer trop de produits différents, n’oubliez pas les produits qui ne figurent pas sur la liste des courses et augmentent la valeur du ticket de caisse ni, bien sûr, les présentoirs événementiels. N’excluez pas les présentoirs permanents, mais réservez-les aux produits à forte rotation (certaines bières, boissons non alcoolisées...). Le rayon du frais peut être utilisé pour des présentations thématiques, mais méfiez-vous des promotions excessives des super-réductions : vous investirez du temps dans de grands présentoirs qui réduiront vos marges. L’entrée du magasin, où des présentoirs (avec ou sans remise) peuvent attirer les clients, est capitale. Et les caisses sont le dernier endroit où vous pouvez vendre un article de plus. « Soyez créatifs ! Et faites des présentoirs une véritable opération gagnant-gagnant : pour la marque, pour l’enseigne et pour l’exploitant indépendant. »

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Shopper & Trade Congres 2024

Moins de déchets, plus d’efficacité

Pour Harro Vlastuin et Frank Hoeckx (Vlastuin et Mr. Flexx® Solutions), il est nécessaire d’associer efficacité dans le magasin et avancées environnementales. Ils soulignent que c’est tout le secteur doit s’atteler à la tâche, car chacun a un rôle à jouer dans le cycle des présentoirs. Il est également nécessaire de réduire le nombre de transports. Pour les magasins proprement dits, Mr. Flexx® met en avant des présentoirs en plastique biosourcé qui peuvent être réutilisés longtemps, que ce soit pour les achats ou le merchandising. On peut d’ores et déjà constater que les retailers, mais aussi un nombre croissant de marques, recherchent des moyens de mieux cartographier le cycle des présentoirs et de le rendre plus efficace et plus respectueux de l’environnement. Les présentoirs ne disparaîtront pas de sitôt, mais la manière dont l’industrie les utilise est vouée à évoluer.

Category management et IA

Tijn Bresser et Olivier Bodson (The Category and Trade Company) ont relativisé les avantages de l’IA – il s’agit avant tout d’un outil – tout en soulignant l’importance d’internaliser les connaissances à ce sujet. L’industrie repose de plus en plus sur les données et l’IA représente avant tout une énorme puissance de calcul. On a ainsi demandé aux Category Managers néerlandais ce qu’ils attendaient de l’IA dans les années à venir. Selon ces derniers, l’IA va avant tout leur permettre de travailler plus rapidement (dans l’accès aux analyses, la prise de décisions). Elle peut également proposer des suggestions en matière de sélection et de répartition des assortiments, contribuer à la planification des promotions et à la politique de prix et jouer un rôle dans les négociations grâce à sa capacité à énumérer des faits. Enfin, les Category Managers s’attendent à ce que l’IA soit aussi utilisée dans l’innovation. Seul bémol : l’IA n’est pas encore vraiment à l’ordre du jour au sein des entreprises, et quand elle l’est, elle reste trop souvent confinée à l’informatique, et pas assez abordée sous l’angle commercial.

ROI, ROI ET ROI

Cyrielle Boi, marketing manager chez Intermarché, a évoqué l’optimisation du retour sur investissement (ROI). Les opérations commerciales, le marketing et même le concept de magasin : tout doit être axé sur l’efficacité. Cette année, 30 magasins (anciennement Mestdagh) seront rénovés dans l’unique but de proposer une meilleure expérience d’achat. Chaque département aura sa propre atmosphère, comme sur un marché.

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Gondola

Intermarché a ainsi travaillé sur plusieurs fronts de l’approche des consommateurs entre 2019 et 2023 : remises, produits frais, assortiments adaptés au client local, produits introuvables ailleurs et assortiment global. Cyrielle Boi : « Nous avons progressé sur chacun de ces points. » Et ces efforts se traduisent aujourd’hui par une part de marché en hausse. Le grand défi reste le rendement au mètre carré, et outre le nouvel aménagement, Intermarché compte sur les CEO indépendants, qui sont également codirecteurs de l’enseigne. Le résultat : un feed-back interne rapide et un système de test et de déploiement parfaitement huilé.

Le Smaakclub est proche des consommateurs

Products and Brands Group fournit des stratégies personnalisées à des vendeurs les plus divers. « Notre travail doit répondre aux attentes de toutes ces parties prenantes », explique Marie Dubois. « Mais l’opinion des consommateurs reste au cœur de toutes les activités commerciales. » Comment maintenir cette proximité du consommateur ? En appliquant les tendances générales (snack hacking, inclusivité, produits du monde, greenvenience, eatertainment et clockless eating) à chaque marque/produit : « L’objectif est de distiller des recommandations locales pratiques à partir de ces grandes tendances. » Il s’agit de traduire correctement votre compréhension pratique des consommateurs en actions commerciales locales. « Le Smaakclub est une plateforme de foodies qui compte déjà plus de 1.750 membres actifs alors qu’elle est active depuis moins d’un an. Nous recueillons du feed-back par le biais d’enquêtes, de kits d’expérience et de panels de tests. Nous complétons ainsi les méthodes traditionnelles permettant d’obtenir des informations sur les consommateurs. » Et oui, Products and Brands Group ouvre désormais son club à d’autres marques !

De grands rêves dans un petit monde

Els Lagrou (Albert Heijn Belgique) a raconté la naissance de « Kleijne wereld, grote dromen » (de grands rêves dans un petit monde). Cette série humoristique est une idée de l’agence de publicité Happiness basée sur la question suivante : « Comment maximiser notre expérience en magasin et notre vision autrement qu’avec plus de publicité (ou de plus de promotions, ou plus d’activation) ? « Nous voulions développer une expérience “in-store” qui donne l’impression d’être “out-store” et ainsi donner l’envie de se rendre dans nos magasins. » Ce qui impliquait une autre manière de communiquer. Chacune des vidéos dérivées – pour De Warmste Week, Saint-Nicolas, Efteling, K3... – met en avant un point fort spécifique d’Albert Heijn. Et ça marche ? Pour beaucoup, la série ne relève pas de la publicité : « Du marketing efficace ne donne pas l’impression d’être du marketing ! »

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Prêt pour l’IA ?

Silvie Vanhout (Gondola Academy) et Christian du Jardin (Gondola) ont cherché à savoir si le secteur était prêt pour l’IA. L’IA impressionne, suscite la curiosité et donne envie d’en savoir plus. Mais certains craignent ainsi qu’elle favorise la désinformation ou engendre des effets négatifs. Et serons-nous encore en mesure de distinguer ce qui est produit par un humain et ce qui est produit par un ordinateur ? Selon une étude de la Gondola Academy, 56% des entreprises préfèrent adopter une attitude plus attentiste et veulent avant tout des réponses à leurs questions. Il y a trop peu d’outils et trop peu de talents capables de réellement exploiter les possibilités de l’IA. L’IA peut être utile pour écrire, inspirer des idées créatives, créer du contenu et analyser des données. Et elle peut être un gamechanger par sa vitesse, les possibilités qu’elle offre de réinventer l’interaction avec les clients, de trouver (plus) rapidement des solutions et des enseignements au sein du service à la clientèle et son potentiel d’innovation disruptive.

Un monde de possibilités

Aline Lemaire (The Coca-Cola Company) a montré de beaux exemples d’utilisation de l’IA dans l’expérience consommateur et le marketing. L’IA a changé la façon de travailler chez Coca-Cola et a le potentiel de réinventer une entreprise. Tout cela dans le seul but de rester pertinent pour les consommateurs ! Coca-Cola encourage ses collaborateurs à apprendre, à tester et à faire de l’IA un fun factor. Il existe des formations internes pour aborder l’IA de manière éthique et on y a créé un ChatGPT interne. L’IA a produit des résultats très différents sur la base d’une seule et même plateforme, parce que le facteur humain continue à jouer un rôle. Et le consommateur dans tout cela ? Il est impliqué dans la plateforme de co-création Coca-Cola Creations, qui a notamment produit l’édition limitée Y3000.

Wim De Mont