Certes, la proposition de loi du député Frédéric Descrozaille doit-elle encore recevoir l'aval du Sénat en février. Mais son vote par l'Assemblée nationale représente une étape importante. Plus que jamais, le législateur français se distingue en Europe par sa volonté d'examiner et réguler les pratiques de négociations commerciales.

C'est une loi controversée, puisqu'elle touche aux difficiles équilibres entre les intérêts des fournisseurs et ceux des distributeurs. Son premier article est déjà explosif, puisqu'il vise les centrales d'achat européennes. Dès le moment où les négociations qui y sont conduites s'appliquent au territoire français, elles seraient désormais soumises aux règles qui s'appliquent en France, et qui ont depuis des années et les loi Egalim 1 et 2, visé à protéger la filière alimentaire de pratiques commerciales trop agressives. "Il s’agit ici de contrer le phénomène d’évasion juridique qui consiste à délocaliser la négociation contractuelle afin de la soumettre à des dispositions juridiques plus favorables et moins protectrices des intérêts des agriculteurs français et du fabriqué en France" disent les auteurs de la proposition de loi.

Le 2e article  prolonge les mesures d’encadrement des promotions et de définition du seuil de revente à perte prévues dès la loi Egalim 1. Les ventes en promotions ne peuvent pas dépasser 34% en valeur et 25% en volume du total des ventes.

Le 4e article vient renforcer les mesures de transparence relatives à l'évolution des prix respectifs des prix des matières premières agricoles et des produits transformés par les industriels. L'intention du législateur est bien que les hausses de tarifs des industriels soient justifiées, et bénéficient bien au monde agricole.

Mais c'est assurément le 3e article qui heurtait le plus les distributeurs, Michel-Edouard Leclerc en tête, puisqu'on lui reprochait de faciliter les prétentions à la hausse des tarifs des multinationales, dans un contexte inflatoire déjà particulièrement tendu. Il règle notamment ce qui devrait se produire en cas d'échec des négociations commerciales annuelles à la date butoir du 1er mars. Le texte a cette fois été amendé. Contrairement à ce que prévoyait la proposition de loi initiale, ce n'est plus dans un tel cas le tarif du fournisseur, et refusé par le distributeur, qui s'applique. En l'absence de toute convention écrite entre les parties, celles-ci ne sont plus liées entre elles par aucune obligation, à commencer par celle qui imposerait au fournisseur une obligation de livraison. Le distributeur conserve de son côté la possibilité de délister les produits du fournisseur. L'article 3 aborde aussi la question des pénalités pour livraison tardive de marchandises appliquées par les distributeurs, afin d'éviter les abus. Ces pénalités logistiques ne pourront être supérieures à 2 % de la valeur des produits commandés. Et aucune pénalité ne peut être infligée par le distributeur au fournisseur lorsque les taux de service mensuel se trouvent être à une limite de 99 % pour les promotions et de 98,5 % pour les produits hors promotion.