C'est désormais officiel: les chaînes de supermarchés britanniques Sainsbury’s et Asda vont fusionner, devenant ainsi la plus grande chaîne du Royaume-Uni. C'est ce qu'a annoncé Sainsbury’s.

La rumeur se voit confirmée: Sainsbury’s et Asda - la branche britannique de Walmart - sont sur le point de fusionner. « Le secteur du retail connait aujourd’hui des changements rapides et importants suivant la dynamique du comportement d’achat des consommateurs. Cela a entraîné une concurrence accrue entre les supermarchés, car les consommateurs recherchent toujours plus de choix, de praticité et de valeur. La fusion entre Sainsbury’s et Asda permettra la création d’une société plus compétitive et durable qui sera plus à même d’investir dans le prix, la qualité, la gamme et la technologie en vue de permettre à la clientèle de faire leurs achats de manière plus flexible » explique Sainsbury’s.

La fusion entre Sainsbury’s et Asda a fait l’effet d’une bombe au Royaume-Uni : en joignant leurs destinées, les deuxième et troisième enseignes de supermarchés du pays prendront en effet la tête du marché. La nouvelle entité détiendrait 2 800 magasins, soit 31,4 % des supermarchés britanniques, juste devant le leader du marché Tesco, et réaliserait un chiffre d’affaires de 70 milliards de dollars. Le regroupement permettra à Walmart de détenir 42% du capital-actions émis de l’entreprise fusionnée. Au moment de la réalisation de cette fusion, Walmart ne devrait toutefois pas détenir plus de 29,9% du total des droits de vote. Le groupe fusionné sera présidé par le Président de Sainsbury’s et dirigé par le CEO et le CFO de Sainsbury’s. Le siège d’Asda restera pour sa part à Leeds et sera toujours dirigé par le CEO actuel, qui rejoindra le Conseil d’Administration du groupe fusionné.

Selon les experts britanniques du retail, il s’agit d’un ‘game changer’ sur le marché britannique de la grande distribution, qui aura de vastes répercussions. “Une fusion leur permettrait d’entrer en concurrence frontale avec Tesco”, a déclaré Richard Lim de la société de conseil Retail Economics à la BBC.

Cette reprise n’est pas non plus une totale surprise. Des quatre grandes chaînes de supermarchés actives au Royaume-Uni, Asda était la moins performante. Les analystes se demandaient depuis longtemps déjà comment elle allait réagir. On a aujourd’hui la réponse. La fusion est par ailleurs aussi motivée par la recherche de nouveaux relais de croissance, difficiles à trouver en interne. Ces dernières années, les discounters Lidl et Aldi ont fortement bousculé le marché britannique, poussant les autres chaînes de supermarchés à repenser leur approche et leur stratégie.

Réduction des prix

L’actuel CEO de Sainsbury’s et futur CEO du groupe unifié, Mike Coupe, a d’ores et déjà annoncé son intention de réduire de 10% les prix de nombreux produits, grâce aux synergies qui seront dégagées.  Cette réduction s’appliquera à de nombreux article de la vie quotidienne dès la finalisation de la fusion prévue pour le second semestre de 2019. « A cette échéance, nous déciderons sur quels produits précisément cette démarque s’appliquera et dans quelle enseigne » a-t-il indiqué.

500 millions de livres de synergies

500 millions de livres de synergies nettes devraient être dégagées à l’horizon 2021, dont 75 millions sur le parc immobilier et 75 millions sur les coûts d’exploitation. Le reste viendra du département des achats. « Nous demanderons à nos fournisseurs d’aligner leurs prix aux prix les plus bas qu’ils pratiquent auprès de l’une ou l’autre de nos deux enseignes » explique Mike Coupe.

Fermetures?

Le coût total de l’opération est de 13,3 milliards de livres, soit 10,9 milliards d’euros. Si à ce jour, aucune fermeture n’est prévue. La fusion reste bien entendu soumise à l’approbation par la CMA, l’Autorité britannique de la concurrence. Il n’est donc pas exclu que le nouveau mastodonte de la distribution doive faire quelques concessions pour obtenir sa bénédiction…

Le commentaire de la rédaction:

Sur le papier, l'opération est un coup de maître, et on comprend l'état d'esprit guilleret du CEO de Sainsbury's, Mike Coupe, qui a réussi à mettre la main sur Asda. Une bonne humeur qui l'a sans doute conduit à un cocasse "accident de direct": se détendant entre deux interviews en direct, il chantonne un air d'une comédie musicale  de Broadway, intitulé "We're in the money" ("On est plein aux as"). Reste encore à voir si l'Autorité britannique de la compétition reprendra avec autant d'enthousiasme le refrain. Voici 15 ans, elle s'était opposée au rachat de Safeway par les ténors du marché que sont Tesco, Asda et Sainsbury's. L'opération aboutit clairement à polariser le marché autour de deux acteurs dominants, Tesco et Sainsbury's - Asda. Paradoxalement, c'est l'essor rapide que connaissent Aldi et Lidl en Grande-Bretagne qui offre le meilleur argument pour répondre à la crainte de constitution d'un duopole. La fermeture de plusieurs dizaines de magasins dans les zones où les enseignes fusionnées pèseraient trop lourd est en revanche plus que probable, sur le mode de ce que l'on a vu chez nous avec Albert Heijn et Delhaize.

La fusion arrange bien Walmart, pour qui Asda était depuis quelques années davantage un boulet qu'un atout: ce sont bien les Américains qui font les concessions les plus nettes dans le deal. Elle promet aussi aux actionnaires une hausse directe des profits (500 millions de livres par an) grâce aux synergies, un grand classique des annonces de fusion, comme on le vit avec Ahold-Delhaize. Autre bénéfice annoncé, autre classique: les baisses de prix dont devraient bénéficier les consommateurs.  Ca fait plaisir et ça ne mange pas de pain.