Le groupe Mestdagh a annoncé, ce lundi 7 mai, le contenu de son plan de restructuration. Celui-ci prévoit un plan de relance commerciale, des investissements importants et des réductions de coûts. Au total, 450 emplois sont menacés. Aucun magasin ne devrait toutefois être fermé, ni franchisé.

Le groupe Mestdagh a annoncé envisager des suppressions d’emplois. 450 emplois sur 2.459 seraient ainsi menacés, soit 18% de l'effectif. La direction, qui indique qu’aucune fermeture de point de vente n’est envisagée, mise - autant que possible - sur un plan de départs volontaires. « Si cette intention devait être confirmée », explique Eric Mestdagh, administrateur et ancien CEO de Mestdagh, « je peux vous assurer que notre ferme volonté est d’en limiter les conséquences sociales en évitant autant que possible les licenciements secs et en privilégiant les départs à la prépension, ainsi que les départs volontaires. Nous envisagerons toutes les mesures alternatives ou d’accompagnement, en concertation avec les partenaires sociaux et avec les autorités ».

« Malgré les nombreux efforts entrepris ces dernières années, les résultats du Groupe Mestdagh sont décevants et se sont soldés en 2017 par une nouvelle perte, pour la sixième année consécutive » déclare le groupe. Le chiffre d’affaires des magasins intégrés ne cesse en effet de baisser depuis 6 ans (de -2% annuellement, avec une accélération à -5,3% en 2017), « la structure de coûts est trop élevée et ne permet pas de garantir la pérennité de la société », précise Mestdagh qui explique notamment subir une concurrence toujours plus rude de la part des « smart discounters », mais aussi de l’e-commerce qui gagne en popularité.

Des coûts en personnel plus élevés que la moyenne

Le groupe affirme en outre que sa part des frais de personnel dans les magasins est plus élevée que la moyenne du marché, à 16,30% du chiffre d’affaires des magasins. Les résultats dégagés ces dernières années ne permettent plus de générer suffisamment de trésorerie pour financer les investissements nécessaires pour le développement des magasins. « Il est primordial de modifier le fonctionnement de l’entreprise et d’enrayer ce cercle vicieux afin d’assurer la pérennité. A défaut, Mestdagh s’expose à de sérieuses difficultés qui pourraient à moyen terme menacer sa survie », explique Guillaume Beuscart, le CEO de Mestdagh.

 

Aucune fermeture

La volonté de la direction de Mestdagh est de ramener l’entreprise sur le chemin de la rentabilité en maintenant le modèle actuel, qui combine des magasins intégrés et des magasins affiliés, ainsi qu’une présence locale forte. C’est pourquoi, aucune fermeture ni aucune affiliation de magasin intégré ne sont envisagées. Pour rappel, Mestdagh dispose aujourd’hui d’un parc commercial de 83 magasins dont 52 intégrés. 

Deux leviers doivent être prioritairement mis en œuvre pour remédier aux problèmes rencontrés : une augmentation des ventes, soutenue par des investissements ciblés, et une réduction des coûts.

Révision de l’offre

Pour redynamiser ses vente, le groupe Mestdagh entend investir dans les rayons qui ont toujours fait sa force: la boucherie / traiteur, le frais, les fruits et légumes et la boulangerie. L’idée est de mieux répondre aux attentes des clients en offrant des produits et des services mieux adaptés aux tendances actuelles : le local, le flexitarien, le bio, la cuisine pratique, la cuisine du monde... En ce qui concerne les boucheries, Mestdagh a l’intention de lancer un concept innovant proposant plus de produits « traiteur » et de le décliner dans des boucheries traditionnelles et des boucheries en libre-service. La même approche serait privilégiée pour les poissonneries.

 

21 millions d’investissements en remodeling

Mestdagh a l’intention d’investir 21,2 millions d’euros supplémentaires dans tous les magasins à l’horizon 2020 avec deux types de « remodeling » envisagés, y compris dans les rayons boucherie-traiteur (un « remodeling » en profondeur pour les magasins les plus anciens et un « remodeling » ciblé pour les autres).

 

Ouverture le dimanche et plus de polyvalence

La direction demande également davantage de polyvalence à ses équipe. Le retailer entend notamment imposer, dans le respect de la législation, l’ouverture du dimanche, en vue de répondre aux attentes des consommateurs.

Une série d’autres mesures devraient être prises pour augmenter la polyvalence : chaque point de vente comporterait désormais un seul « univers » (hors boucherie) et des formations systématiques seraient organisées pour aider le personnel à opérer cette transition. Les horaires de travail devraient être révisés et standardisés afin d’assurer le service en magasins de manière optimale tout en tenant davantage compte des aspirations du personnel. La direction a notamment évoqué la suppression du quart d’heure payé, à savoir une pause de 15 minutes qu’avait déjà supprimé Carrefour au moment de l’annonce de sa propre restructuration.

Expansion des Drives

Les efforts de Mestdagh pour redynamiser les ventes portent aussi sur l’innovation et la digitalisation. La direction envisage en effet de développer une offre de service multi-canal, afin d’augmenter le chiffre d’affaires dans les points de vente. Cette approche inclut notamment un déploiement plus large des Drives (5 sont déjà prévus pour 2018), le déploiement de service de retraits d’achat dans les magasins et le développement de la livraison à domicile au départ de certains points de vente.

« Nous sommes pleinement conscients de l’émotion que ces annonces peuvent engendrer », explique Guillaume Beuscart. « Néanmoins, ces projets sont indispensables pour stopper le cercle vicieux dans lequel nous nous trouvons actuellement. La situation du secteur de la distribution est difficile pour le moment, en raison de la pression concurrentielle et des nouvelles habitudes de consommation des clients. Chez Mestdagh nous voulons tout faire pour retrouver le chemin de la rentabilité et sauvegarder ainsi nos magasins et notre modèle intégré ».

« Le plan Mestdagh 2020 applique à la lettre le plan de transformation Carrefour 2022, à cela près qu’aucun investissement n’est prévu en matière de PL, puisque c’est Carrefour qui fournit ses private labels à Mestdagh. Reste à savoir comment, exactement, le groupe Mestdagh va parvenir à gérer le paramètre digital de son plan » réagit Pierre-Alexandre Billiet, CEO Gondola Group.

 

'Master franchiser' Carrefour Market pour le sud du pays

Pour rappel, Mestdagh est de facto le master franchiser Carrefour Market pour le sud du pays, ce qui crée des obligations envers son puissant allié. Le contrat liant Mestdagh à Carrefour arrive à échéance en 2020, date à laquelle il faudra en renégocier les termes. Carrefour détenant 25% du capital de l'entreprise, un changement radical semble ceci dit peu probable. 

En scellant sa collaboration avec Carrefour lors de la restructuration connue par ce dernier en 2010, Mestdagh n'a pas seulement repris - à très bon compte, se dit-il - 16 magasins Carrefour menacés, logés dans une structure distincte. Il a aussi converti tout son parc, en le faisant passer de l'enseigne Champion (autrefois détenue par le groupe français Promodès, avant la fusion de celui-ci avec... Carrefour) au concept et cahier de charges Carrefour Market. Les magasins revendiquent toutefois ouvertement leur appartenance au groupe familial qui a toujours bénéficié d'une image flatteuse: "Carrefour Market Groupe Mestdagh" figure en bonne place dès l'entrée. "Dans le réseau Carrefour Market, Mestdagh maintient pourtant quelques traits spécifiques. Il dispose par exemple d'un outil logistique qui lui est propre. L'excellente réputation dont jouit Mestdagh sur le frais, et en particulier la boucherie au comptoir service traditionnel, a longtemps fait figure d'atout. Mais c'est un terrain sur lesquels certains de ses concurrents directs en Wallonie, tels qu'Intermarché, ont résolument choisi l'offensive. Mestdagh se doit d'être à la fois loyal à Carrefour Market et fidèle à certains de ses éléments de différenciation: un exercice délicat. C'est peut-être de la sorte qu'il faut lire les échos ayant circulé dans le métier, et selon lesquels l'entreprise a récemment lancé une procédure de recrutement de spécialistes du frais dans les équipes d'achat qui lui sont propres" analysait récemment Christophe Sancy, Rédacteur en Chef de Gondola Magazine.

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