Comme chaque année, Gondola publie une étude qui, sous forme de poster, met en perspective le marché FMCG belge et affiche les évolutions des différentes catégories dans les supermarchés.  Nous tenons bien évidemment à vous livrer quelques commentaires relatifs à ce poster baptisé “The Big Picture”.

C’est une tradition : chaque année, Gondola mène une large enquête sur les évolutions du marché du food retail belge. Les résultats du Gondola Retail Scan sont transposés sous la forme d’un poster, où vous retrouvez les parts de marché des différents retailers belges présentées de façon claire et transparente. Depuis quelques années, nous nous intéressons également au marché des FMCG dans le cadre de notre poster ‘The Big Picture : The Evolution in FMCG’. Nous y résumons les évolutions des différentes catégories FMCG dans un aperçu visuel facile à lire.

Comme pour le Gondola Retail Scan, les données sont collectées par The Retail Academy, le département consulting et formation du Groupe Gondola.  Et, tout comme pour les dossiers publiés mensuellement sur les différentes catégories de produits, les données de The Big Picture sont fournies par le bureau d’études Nielsen. Bien que ce poster synthétise des évolutions complexes, nous tenons cependant à vous fournir quelques explications sur l’étude et les données présentées, afin que chacun puisse interpréter le poster correctement et en tirer les bonnes conclusions. Nous tenons en outre à attirer l’attention de nos lecteurs sur certaines évolutions qui nous ont frappés à l’analyse des données et lors de la création du poster.

Aucune comparaison ne peut être faite

Bien que le poster The Big Picture de 2017 couvre les mêmes quatorze catégories et la même période (de juillet à juin), il ne peut toutefois être comparé strictement à celui de l’année passée. Silvie Vanhout de The Retail Academy nous explique pourquoi : “Les changements intervenus dans les définitions des catégories imposent une certaine prudence. Toutes les catégories ne sont pas comparables. Au total, il y a une différence de 0,59%. Il s’agit là certes d’une très petite différence, mais nous tenons à publier les données correctes.”  Les plus grands changements en termes de catégories se manifestent pour les segments des Private Labels du rayon Bakery & Toast (de façon négative), les Private Labels du rayon frais (de façon positive), ainsi que dans les Private Labels du rayon Sucre et Edulcorants (de façon positive). Le Poisson Frais et les Crustacés constituent quant à eux un nouveau segment dans la catégorie “Fresh Products” et représentent 0,7% du total des FMCG.

Le marché à la hausse

Une première conclusion pour le marché global des FMCG est qu’il est en croissance.  Sur base annuelle, le marché augmente de 1,2%.  Les marques A progressent de 0,6% et les MDD ou “Private Labels” (PL) de 2,3%. Les catégories qui se développent le plus rapidement par rapport à l’année dernière sont : Nutrition infantile (PL + 43,6%), Insecticides (marques A + 35,7%), Soupe et bouillon frais (PL + 21,6%), Soins pour le peau (PL + 16,6%) et aide à la pâtisserie et desserts (+13,6%).

Private Labels

Vous aviez déjà pu le comprendre ci-dessus : les Private Labels se développent plus fortement que les national brands (qui représentent toujours plus de 64% de la valeur du marché total des FMCG). En conséquence, la part de marché des PL a augmenté. Au total, la valeur des MDD dans les FMCG atteint désormais 35,3% : 25,8% pour l’alimentation et 36,9% pour tout ce qui est non-alimentaire.

Dans le top 10 des produits disposant du plus grand potentiel de croissance se trouvent maintenant également huit variantes de Private Labels de différentes catégories et “seulement” deux variantes de marque.

Les perdants

Là où il y a des gagnants, il y a malheureusement aussi des perdants. Les catégories perdant le plus de valeur sont : les désodorisants PL (-20%), les cirages (-12,4% pour les PL et -7,8% pour les marques A), les marques de puériculture (-6,6%) et les aides à la pâtisserie et desserts marques A (-6,8%). Pour cette dernière catégorie, la chute pourrait s’expliquer par un switch vers les Private Labels.

Le sixième plus grand perdant est celui de la catégorie alcool et spiritueux de marques A, en baisse de 6,3%, résultant très probablement de la hausse des droits d’accise qui a été mise en place en novembre 2015.  La catégorie Santé et Beauté va également à contre-sens. Cette catégorie a perdu 0,5% l’année dernière et cette tendance s’accélère avec une perte de -1% cette année-ci. La catégorie Housekeeping retrouve par contre un peu de couleurs : la baisse constatée l’année dernière ( -1,8%) se stabilise (+ 0,2%) cette année.

Produits laitiers sous pression

Les produits laitiers sont également sous pression (-1,1%). Ici, ce sont principalement les marques A qui perdent du terrain (-2,3%), alors que les marques de distributeur évoluent de façon légèrement positive (+ 0,6%).  Dans la catégorie des fromages, les marques reculent (-3,5%), tandis que les MDD progressent (+ 1,2%). La catégorie du lait perd également 4%, en raison principalement de la mauvaise santé des PL qui représentent 58% des ventes dans cette catégorie et enregistrent une chute de -4,7%. Les marques A de ce segment reculent moins fortement (-2,9%).

De plus en plus de marques

Les Private Labels ne sont pas maîtres en tout. Bien au contraire : dans certaines catégories, les marques A gagnent du terrain. Par exemple, Bakery & Toast est une catégorie qui enregistre une hausse de 2,5% et dont la part de marché des marques A est de 46,6%. Et ce sont bien ces marques A qui se développe le plus vite ici (+3,2%). Au sein de la confiserie, les marques A sont également les plus performantes (+ 1,8% alors que les PL sont en baisse de -1,4%).

Boissons non alcoolisées

Encore une fois, les marques s’en sortent très bien dans la catégorie des boissons non alcoolisées. La catégorie évolue favorablement avec une croissance de 4,6%, et les marques A prennent le dessus avec 76% des ventes. En outre, ce sont les marques qui se développent également le plus rapidement (+ 5,2% par rapport à + 2,8% pour les PL). Les eaux forment la sous-catégorie ayant le meilleur taux de croissance des boissons non alcoolisées : le segment progresse de 6,9%, les marques de 5,7% et les MDD de près de 10% (+ 9,9%). Les boissons pour sportifs et autres boissons énergétiques se portent également très bien (+ 6%) ; ici aussi, la plus forte croissance vient des PL + 10,1% (marques A + 4,7%). Seule une sous-catégorie enregistre des résultats négatifs : il s’agit des jus (-3,7%), tant les marques A (-5,1%), que les PL (-2,4%), sont en diminution.

Le commentaire de nos experts

« Il est chaque année utile et agréable de pouvoir suivre l'évolution des différentes catégories » nous explique Sylvie Vanhout de The Retail Academy. « Avec une inflation atteignant 1.78%, la hausse de 1.2% enregistrée par l'univers FMCG ne peut pas légitimement être décrite comme de la croissance. Et si l'on replace ces chiffres dans la perspective des années précédentes, on doit constater que les Private Labels ne cessent d'afficher une croissance plus dynamique que celle des marques A. Quels enseignements tirer, si l'on replace les derniers chiffres dans une évolution sur quatre ans? On note d'abord la croissance explosive des Private Labels dans des catégories telles que, par exemple, les potages et bouillons frais, ou l'alimentation infantile. Ces deux catégories progressent de légèrement plus ou légèrement moins de 100% par rapport à 2014. Mais les références Private Label dans les sucres et édulcorants, ou les aides à la pâtisserie et desserts progressent également de plus de 50% sur la même période. Parmi le top 10 des meilleures croissances enregistrées entre 2014 et 2017, on trouve 7 Private Labels et 3 marques A. Pas étonnant que cette tendance à moyen terme se traduise aussi dans les chiffres spécifiques à chaque année prise individuellement », poursuit notre interlocutrice.

Notre rédacteur en chef Christophe Sancy est lui aussi frappé par certaines évolutions. « Quand nous avions publié voici quelques années la première mouture FMCG du Gondola Retail Scan, nous avions choisi de le baptiser 'The Big Picture', et je ne regrette pas ce choix. Rassemblées sous forme synthétique, ces données forment un portrait saisissant de la santé du marché. Un portrait parfois contrasté. Le bilan global est, lui, médiocre. Le patient manque de tonus. Mais le plus intéressant est d'identifier dans cette sorte de "promenade" visuelle parmi les catégories, celles qui échappent au contraire à la morosité. On comprend alors qu'il n'y a pas d'explication universelle ni de stratégie valable pour tous types de catégories, chacune ayant ses propres contraintes, parfois très particulières: pensons par exemple aux alcools et spiritueux qui se prennent de plein fouet la baffe du tax shift. » 

« Mais il n'y a pas non plus de fatalité" poursuit Christophe Sancy. « Voyez la dynamique affichée dans les soft-drinks et les eaux. Elle s'appuie souvent sur de nouvelles propositions, branchées en direct sur les attentes ou préoccupations changeantes du consommateur. J'aurais tendance à considérer que le rythme de ces évolutions-là tend à s'accélérer. Parfois, on part plus vite à la baisse hélas. C'est souvent l'indice d'un opportunisme du consommateur, qui choisit d'acheter un prix, ou d'attendre l'aubaine promotionnelle pour concrétiser son achat. L'arrivée du Low End Retail lui donne de ce point de vue de nouvelles opportunités de payer toujours moins ». 

« Mais il y a aussi des catégories ou des segments en grande forme, souvent ceux qui sont profilés sur les tendances de consommation ou l'évolution du mode de vie du consommateur. Quand on peut revendiquer et établir une évidente plus-value, en termes de facilité, saveur, authenticité, facteur santé, modernité, la question du prix ne se pose plus de la même façon. C'est l'éternel refrein: pas de croissance sans innovation. Le phénomène relativement nouveau, c'est que l'innovation n'est plus le territoire exclusif des marques nationales. Les marques de distributeurs ne se contentent plus de suivre la tendance, elles prennent parfois les devants. Tout ceci représente un fameux défi pour les responsables marketing et sales. On est au-delà de l'innovation: c'est toute la légitimité de sa marque qu'il s'agit de maintenir et prouver au consommateur. Les recettes classiques atteignent leurs limites. C'est l'intérêt mutuel des distributeurs et de leurs fournisseurs de collaborer sur ce chantier. Personne n'a intérêt à ce que cette "Big Picture" reste un peu sous-exposée. »