Le marché du bio fait chez nous une incroyable percée, bien qu’elle reste en-deçà de ce que l’on observe chez nos voisins français. Parmi les enseignes spécialisées les plus actives sur notre marché, on retrouve la coopérative d-färm qui entend d’ici 2019 disposer de 16 points de vente sur le sol belge.

Une vingtaine de centres urbains sont actuellement à l’étude à travers la Belgique entière. L’an prochain, l’enseigne bio devrait d’ailleurs faire son apparition sur le sol flamand. A l’occasion d’un dossier complet à paraître dans l’édition Juin-Juillet de Gondola Magazine, nous nous sommes entretenus avec Alexis Descampe, co-fondateur de färm.

Où en est le parc commercial de d-färm ? Et où en est le parc franchisé ? De nouvelles ouvertures sont-elles dans le pipe-line ?

Aujourd’hui, nous disposons de six points de vente, dont 5 à Bruxelles et 1 à Louvain-La-Neuve. Quatre sont gérés en propre et deux sont affiliés (ils se situent à la Bascule et à Louvain-La-Neuve).

Nous faisons une différence entre franchisés et affiliés. Concrètement, nous reprenons l’aspect classique de la franchise, c’est-à-dire qu’il y a là une utilisation de la notoriété de la marque, ainsi qu'un support, mais allons au-delà de cela. Puisque nos affiliés ont des parts dans la maison mère et font donc partie intégrante du projet et de la coopérative.

Concernant l’ouverture de nouveaux magasins dans un futur proche, je tiens à rappeler que nous venons, en très peu de temps d’en ouvrir trois : deux nouveaux, dont celui de Louvain-La-Neuve, et un déménagement d’une petite structure vers une plus grande, le point de vente historique The Peas à Etterbeek. Nous allons donc maintenant prendre un peu le temps. Mais on ne peut exclure d'en ouvrir encore un ou deux d’ici la fin de l’année. Nous sommes d’ailleurs en discussion avec deux affiliés.

Vos ambitions de détenir 16 magasins d’ici 2019 sont-elles toujours d'actualité, et sur le point d’être réalisées ?

L’ambition reste en effet la même, nous disposons de 6 magasins et comptons en ouvrir 10 encore d’ici 2019.

Qu’en est-il des ambitions nationales ? D’autres magasins sont-ils prévus en dehors de Bruxelles et de Louvain-la-Neuve ?

Nous étudions une vingtaine de villes notamment en fonction de la densité de population. Nous sommes actuellement en discussion avec des affiliés pour des succursales hors Bruxelles, mais je ne peux en dire plus pour l’instant…

Quoi qu’il en soit, notre concept est clairement urbain, nous n’allons donc pas nous installer dans des milieux à densité de population faible et visons les grandes villes. Le principal des ouvertures se fera en outre en affiliation. Nous pensons encore ouvrir 1 ou 2 magasins en propre, pas plus. Idéalement, nous souhaiterions faire notre entrée en Flandre dès l’an prochain.

Votre premier magasin, The Peas à Etterbeek, faisait par sa taille figure d’exception. Pourquoi avoir décidé de le déménager ?

Le magasin The Peas ne correspondait plus au modèle que nous avons développé au fil des années. Le point de vente s’étalait sur une surface de 150m2, là où notre concept fait aujourd’hui une moyenne de 300m2. Si l’offre fruits et légumes y était assez développée, le reste de l’offre frais et locale, qui est notre créneau, comme les fromages à la découpe, le traiteur, etc. n’était pas ou peu présente en raison de la taille du point de vente. Nous ne pouvions y intégrer notre cuisine.

En conséquence, il ne correspondait plus à notre concept. Il faut se rappeler qu’il s’agissait là d’un tout autre concept, intitulé The Peas et qui tenait davantage de la boutique de quartier. Le consommateur n’y trouvait pas tout ce dont il a besoin.

On sent en Belgique la montée du Bio, mais encore rien de comparable à ce que l’on peut observer en France. Quel est votre regard sur le marché bio en Belgique ? Pensez-vous que ce marché va suivre le même chemin qu’il a pris chez nos voisins ?

En effet, le marché belge du bio est très différent de ce que l’on peut trouver en France. Comparé à celui-ci, il est très peu structuré. Et en dehors peut-être de Bio-Planet ou de Origin’O, les acteurs n’ont pas de réelles visions à long terme.

Je ne suis pas devin, mais aller vers une structuration du marché, me semble être une étape logique dans notre pays. Selon moi, il faut s’attendre à une consolidation, un regroupement d’acteurs qui partagent la même conception, les mêmes valeurs. Cela pourra se faire au niveau de la production, voire de la logistique, mais une consolidation et une structuration du marché est un passage presqu’obligé. On devrait en arriver à l’apparition de plus grandes enseignes au niveau national.

Toutefois, il faut être prudent, car le consommateur belge a aussi des craintes lorsqu’il s’agit de plus grandes chaines. La confiance ne règne pas. La force d’une marque est de véhiculer des valeurs. Je le vois déjà à l’échelle de färm. Certains consommateurs se méfient et voient dans les chaînes un éventuel danger, une force trop commerciale. Il faut redonner confiance et offrir de la transparence sur les valeurs que défend une enseigne.

De quoi a besoin le consommateur belge pour se tourner davantage encore vers le bio ?

Le consommateur a besoin de plus de transparence, de plus d’informations. Aujourd’hui, il est bombardé d’informations sans réelle transparence. Il est frappant de constater que de grandes marques aujourd’hui communiquent sur leurs emballages des choses telles que « garanti sans pesticide » sans pour autant pouvoir labéliser leurs produits « bio ». Cela a pour conséquence que le consommateur, plutôt que de chercher, abandonne souvent. Il y a une réelle demande de davantage de transparence qui permettra aux consommateurs de faire des choix conscients.

Les initiatives de quartiers comme La Ruche et bien d’autres sont en train de fleurir un peu partout. Quel est votre regard sur ceci ?

La Ruche n’est justement pas réellement un petit acteur, c’est une grande structure parisienne. C’est en quelque sorte l’ubérisation du bio. Bien entendu les abeilles et petits producteurs qui participent au projet sont heureux de participer à de telles initiatives.

Quant à la multiplication des initiatives et petits magasins indépendants, c’est une excellente nouvelle ! Cela offre de la diversité aux consommateurs et donc du choix. Nous partageons les mêmes valeurs telles que celle de la consommation durable. Bien sûr, il s’agit là d’une forme de concurrence, mais j’ai l’espoir, partageant les mêmes valeurs, que l’on puisse ensemble se structurer et travailler main dans la main pour valoriser les produits bio. Nous pourrions travailler ensemble au niveau de la logistique ou la production par exemple pour offrir à tous l’accès au bio.

Les prix du bio sont généralement plus élevés. Ces prix sont-ils selon vous justifiés ? Serait-il possible de les baisser ? Pourquoi (pas) ?

Les prix sont plus élevés car le processus coûte à la base plus cher. La méthode de la production bio est génératrice de coûts supplémentaires. Mais cela n’est en réalité qu’une impression, car la pratique a un impact moindre sur de nombreux coûts. Pensez à l’impact sanitaire, au système de soin de santé, à l’impact environnemental, … En caisse, le consommateur a l’impression de payer moins cher les produits de circuits traditionnels. Mais en réalité, les coûts économisés sur le ticket de caisse sont absorbés à d’autres moments de la vie. Il y a là une externalité des coûts dont on n’a pas forcément conscience, bien que de plus en plus de consommateurs s’en rendent aujourd’hui compte.

Il est toutefois selon moi possible de réduire les prix du bio. En structurant la production, nous pourrions faire baisser les prix de quelques pourcents, mais le bio restera toujours plus cher que le conventionnel.