Le distributeur met progressivement en oeuvre la solution d’optimisation des linéaires d’Aldata

Gérer l’assortiment, optimiser l’espace linéraire: on touche là à des tâches essentielles du métier de distributeur. Le category management est un enjeu majeur: bien construit et bien exécuté, il est une source majeure de performance. Voici un an, on apprenait que Delhaize Belgique avait décidé de gérer ses planogrammes en s’appuyant sur une solution logicielle développée par Aldata, Apollo Designer Workstation. L’implémentation du système est aujourd’hui effective pour 24 magasins, et avant la fin 2011, c’est tout le réseau de l’enseigne au lion qui verra ses linéaires gérés par cet outil d’optimisation. Aldata organisait le 27 mai dernier un séminaire à Bruxelles, et y présentait des études de cas liées à ses clients Delhaize ou Yoplait. Nous vous livrons ici le compte-rendu de notre entretien avec Didier Jumeau, Directeur solutions merchandising chez Aldata Solution.

Tous les retailers, en Belgique comme ailleurs, visent en permanence à optimiser la performance de leurs linéaires. Le premier objectif est bien entendu de baisser autant que possible les niveaux de stock en magasin, afin de pouvoir affecter les ressources financières à d’autres opérations. Et l’impact d’une gestion optimisée du linéaire semble ici énorme, si l’on en croît les chiffres annoncés par Didier Jumeau: “On constate que le recours à la solution Apollo permet d’atteindre des résultats plus qu’impressionnants: entre 15% et 25% de diminution du stock. Et ceci tout en évitant les ruptures!” La rupture: l’autre ennemie que cherche à éviter tout bon commerçant. En disposant d’une chaîne logistique performante, mais aussi en étant capable d’attribuer à chaque produit un facing proportionnel à la demande.

Cette définition du planogramme, cette gestion du linéaire, elles ont de tout temps été menées. Ce que le software Apollo permet désormais, c’est de le faire dans une perspective moins rigide, dynamique, prenant en compte les spécificités d’implantation de chaque magasin et le comportement d’achat particulier de sa clientèle. Fini le règne du “One size fits them all”, le planogramme pourra être défini de façon beaucoup plus fine, sur base des données propres au point de vente. Une référence donnée sous-performe-t-elle dans un magasin par rapport à la moyenne? Son facing pourra être revu à la baisse, et l’espace consacré à d’autres produits à meilleure rotation: on réduira d’autant le risque de ruptures. La méthode constitue dès lors une forme de rééquilibrage permanent en fonction des données de vente, et les recommandations d’implantation seront définies sur base de données objectives. On peut donc bel et bien parler d’optimisation: chaque coûteux cm2 de surface commerciale est alloué à une référence en fonction de sa performance locale. Et cet exercice ne se traduit pas uniquement à l’intérieur d’une catégorie, artificiellement isolée du contexte global, comme le souligne Didier Jumeau: “Dès que vous êtes capable d’optimiser une catégorie dans un magasin, ceci peut avoir des conséquences sur des catégories voisines.

Bénéficie-t-elle d’un espace disproportionné par rapport à son potentiel ? On pourra lui retirer un module, qui sera peut-être bien utile à une autre catégorie. En gérant le linéaire de la sorte, on se donne les moyens de gérer la question de l’espace, d’optimiser celui-ci. Or, traditionnellement, et faute d’un outil adapté pour le faire, on ne procède à de tels arbitrages que très rarement dans un magasin, à la faveur d’événements exceptionnels: un agrandissement, un revamping...”

User friendly. En intégrant toutes les données, un système tel qu’Apollo permet de rafraîchir le planogramme à un rythme bien plus soutenu qu’auparavant. La fréquence de révision est souvent dictée par le rythme d’apparition des innovations au sein de la catégorie. Là où les retailers avaient l’habitude de remettre en cause le planogramme une fois par an, plus rien dans cette hypothèse ne s’oppose à ce qu’ils le fassent une fois par mois, voire chaque semaine. Rien sauf sans doute la disponibilité du personnel nécessaire pour assurer ce rackjobing. Pour le personnel en magasin, Apollo apporte aussi son lot de confort: puisque le système gère le planogramme à l’échelle de chaque point de vente, il en maîtrise toutes les particularités.

Résultat: les livraisons de produits sont préparées dès la palettisation en entrepôt pour correspondre à la structure du planogramme local. Le gain de productivité est évident. Et l’aspect pédagogique est aussi précieux: le système peut traduire sous une forme visuelle la “to do list” de chaque collaborateur, lui fournir une illustration du positionnement de chaque référence, ou encore lui donner des instructions très claires lorsque, par exemple, une opération de maintenance prévoit une réduction de facing. Quelle étagère? Quel produit? “Pour que ce type de projet soit accepté en magasin”, commente Didier Jumeau, “il faut que son utilisation soit très simple, et que ses instructions offrent un reflet absolument fidèle du mobilier installé.” Justement, le recensement initial du plan propre à chaque magasin ne devient-il pas alors une tâche titanesque? “Pas réellement. On part d’une mesure linéaire au sol, on compte ensuite le nombre d’étagères. Après il sera bien sûr capital de maintenir une description parfaitement fidèle de la réalité du terrain. Les ressources offertes par l’intranet du distributeur le permettent. L’enjeu central est bien entendu de faire en sorte que les responsables de magasin et de rayon utilisent l’outil.” Compte tenu de cet enjeu, les équipes de Delhaize mettent bien entendu en place les moyens d’accompagnement indispensables pour permettre à tout un chacun de se familiariser avec un outil dont la bonne maîtrise est indispensable à l’organisation. Et cette conduite du changement connaît évidemment un phasage: 24 magasins sont aujourd’hui gérés de la sorte, et il faudra attendre la fin 2011 pour que l’ensemble du parc soit concerné.

Mode collaboratif. Question: en gérant de la sorte les catégories, un retailer maintient-il encore une forme de dialogue avec les marques? Didier Jumeau répond: “Un industriel sera toujours capable d’apporter sa recommandation d’implantation. Mais il le fera sous forme électronique, s’il possède notre système, et dialoguera avec le distributeur en reprenant le paramétrage de celui-ci. L’expérience que nous avons connue aux Etats-Unis avec un client tels que Kroger montre aussi que le système peut parfaitement se traduire sur un mode très collaboratif. Kroger a installé un local open space équipé de 40 postes de travail. Les industriels peuvent venir y travailler en binôme avec les category managers. “ Didier Jumeau pointe aussi les avantages que représente l’utilisation d’un outil commun aux deux partenaires commerciaux: la possibilité de préparer des propositions sous forme de fichiers directement exploitables par le retailer, bien loin des traditionnelles présentations Powerpoint. Ou encore, argument valide, la capacité de capitaliser sur l’expérience.

Qui n’a jamais entendu un Key Account se plaindre du rythme de rotation de ses interlocuteurs chez les retailers? Un collaborateur qui quitte l’entreprise ou change de fonction représente souvent une cruelle perte d’expérience que la solution Aldata permet d’amenuiser, puisque l’ensemble de l’historique, du travail commun, est archivé.Et les affiliés? Si la question du déploiement de la solution Apollo au parc intégré ne se pose pas, reste bien sûr encore à convaincre les affiliés de s’aligner. En toute logique, la mise en oeuvre commence par les magasins intégrés, ce qui doit permettre un retour d’expérience chiffré motivant. Didier Jumeau se montre assez optimiste: “Les affiliés ou franchisés sont des commerçants dans l’âme, très sensibles à tout élément susceptible d’améliorer leur performance opérationnelle.

Le système offre l’avantage de permettre des analyses économiques, de démontrer avec une simulation quel avantage en marge ou chiffre d’affaires ils peuvent tirer d’une organisation optimisée de leur linéaire, quel manque à gagner ils peuvent aller chercher en corrigeant quelques paramètres.” Bien entendu, pour permettre une simulation, il faut d’abord procéder à un relevé de la catégorie telle qu’elle se présente en magasin. Un exercice souvent long à mener: pour une catégorie telle que l’ultra-frais, il faut compter de 4 à 6 heures de travail. Mais Aldata a développé un module permettant d’accélérer et automatiser cette tâche: il suffit de prendre en photo chaque élément modulaire de la catégorie et de charger ces photos dans la bonne séquence. Le logiciel va alors “assembler” le panorama de la catégorie, reconnaître les références présentes, et traduire sous une forme électronique le planogramme en magasin. Il sera dès ce moment possible de le modifier, de procéder à toutes les simulations souhaitées. Autrement dit, de comparer la rentabilité de l’implantation existante à celle que l’algorithme du système se charge d’optimiser.

Vers un merchandising de gestion. Depuis 2003, le système de gestion Apollo n’a cessé d’évoluer (on en est aujourd’hui à la version 5) et a su convaincre de nombreux “poids lourds” du retail international. “Nous avons été les premiers sur ce terrain, nous sommes aujourd’hui les seuls à pouvoir offrir autant de références opérationnelles: une soixantaine de clients avec lesquels nous collaboraons sans cesse, puisqu’ils sont réunis dans des clubs d’utilisateurs. Delhaize a par exemple influencé notre dernière version en nous incitant à tenir compte de la présence d’un pilier ou d’une bouche à incendie.» Plus globalement, l’apparition de systèmes tels que Apollo Designer Workstation représente une évolution majeure, un changement de perspective: le passage d’un merchandising de théâtralisation à un merchandising de gestion. Autrement dit, une pratique qui s’appuie sur des indicateurs économiques avérés: taux de rupture, chiffre d’affaires, marge, rotations. Et qui, loin d’imposer à toutes les situations commerciales une réponse uniforme, leur destine des réponses parfaitement adaptées, jusqu’à l’échelon purement local.