-3% sur une sélection bimensuelle de 500 produits, jusqu'à la fin 2012Décidément, la pression concurrentielle monte. Dans un climat socio-économique qui invite le consommateur à l'économie, les enseignes alimentaires belges ne cessent de prendre des initiatives pour le convaincre de la compétitivité de leurs prix. Delhaize n'a cessé de mettre en évidence en 2012 des vagues successives de baisses de prix sur de nombreux articles. Une pratique courante chez cette enseigne depuis 2008 et le repositionnement sur l'image-prix. Même si dans le cas de certains produits, la baisse de tarif du printemps succède à... une hausse préalable à l'automne précédent. Ces ajustements concurrentiels sont désormais communiqués de façon large. Carrefour a lui aussi baissé bon nombre de prix. Qu'allait donc faire Colruyt, le leader incontesté sur l'image-prix ? Le distributeur de Hal surprend, en prenant l'initiative sur un autre terrain.

Alors que ses concurrents jouent sur le niveau de prix en fond de rayon, finalement peu visible une fois passé l'effet d'annonce, Colruyt adopte un langage promotionnel extrêmement puissant. Non content d'afficher des prix planchers garantis par le système du téléphone rouge, et d'y avoir encore ajouté les rabais automatiques offerts aux clients titulaires de la carte Extra, voici à présent que l'enseigne installe de façon permanente, jusqu'à la fin de l'année 2012, le système de la ristourne supplémentaire de 3% déjà pratiquée ponctuellement.

Le principe? C'est Jean-Pierre Roelands, directeur commercial, qui l'explique: « Les meilleurs prix, nous les garantissons depuis toujours, pour chaque produit. Maintenant, tous les 15 jours, nous sélectionnons dans notre assortiment, en accord avec nos fournisseurs, environ 500 produits de consommation courante : boissons fraîches, conserves, biscuits, viande. Sur ces produits, en plus du meilleur prix et de la réduction Extra classique, nous accordons une réduction supplémentaire de 3 %. Il peut s'agir de produits de marques nationales, mais aussi de marques propres ou de produits les moins chers dans leur catégorie. Comme nous choisissons des produits dans ces trois catégories, chaque client y trouvera son compte et chacun y gagnera aussi en pouvoir d'achat. Bref, nous voulons que les clients en aient plus pour leur argent. »

Deux écoles différentesSi Colruyt introduit ce système de bonus, c'est parce qu'elle dit avoir "remarqué un changement important dans le comportement d'achat de ses clients, influencé par la baisse du pouvoir d'achat." Nul doute que c'est aussi une réponse du berger à la bergère, face aux annonces faites par la concurrence. A cette différence près que Colruyt déteste suivre les sentiers battus. Annoncer des baisses de prix? A quoi bon, quand on s'organise pour réagir au quart de tour et pouvoir toujours prétendre au prix le plus bas ? Non, la voie choisie par Colruyt est bien plus offensive, elle enfonce le clou de la bonne affaire. Et s'appuie sur un raisonnement que nous ne sommes pas loin de partager: annoncer une baisse de prix sur des centaines de références, c'est pour le consommateur à la fois une bonne nouvelle... et une abstraction. Le consommateur se forge bien sûr une image-prix, mais quand il devient shopper, il a la mémoire courte. Offrir 3% de ristourne supplémentaire sur 500 produits identifiés comme tels en rayon, c'est rendre visible l'avantage, et encourager le shopper à remplir son panier puisque cette aubaine est passagère. En la signalant systématiquement en magasin, on achève de dynamiser un comportement d'achat décrit comme déprimé...

Cette différence d'approche dans la façon de communiquer l'avantage-prix nous renvoie à l'éditorial du Gondola magazine de janvier dernier, où nous opposions les stratégies suivies en 2011 par Tesco et son rival Asda, en Grande-Bretagne. Alors que Tesco avait misé sur une campagne de baisse de prix généralisée baptisée "The Big Price Drop", Asda avait choisi, avec bien plus de succès, de les traduire de façon ciblée, visible et temporaire sur une série de produits. Manifestement, Colruyt se sent plus proche de l'école Asda, celle qui entend compenser le manque à gagner de la ristourne par une augmentation du panier. Un pari qui serait fait "en accord avec les fournisseurs". Une certitude: ceux-ci sont de plus en plus sollicités, c'est un euphémisme, par tous les retailers, sur un marché très nerveux. Le consommateur a-t-il vraiment changé son comportement d'achat? Ne risque-t-on pas de partir vers une surenchère qui éduquerait le consommateur à ne plus acheter qu'en fonction des promotions, et à nous engager dans la situation évoquée notamment par nos confrères tchèques et italiens, dans le numéro de mai de Gondola? Notre magazine tâchera de répondre à ces questions dans son édition à paraître à la fin de ce mois.

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